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Bouquin-quizz n°2

Publié par le 22 septembre 2014

Bonjour à tous.

Voici un extrait de…
Je veux dire d’un roman de…
Non. Finalement, je ne vais pas vous l’indiquer. Ça vous amusera peut-être d’essayer de deviner.

Quelques indices, tout de même : c’est un roman américain ; l’une de ses adaptations au cinéma est française ; Michel Simon figure au générique.

Et si ça ne vous amuse pas de deviner, je vous conseille de le lire quand même. Ça vaut !

Vers midi, ils m’ont viré du camion de foin.
J’avais sauté dedans, juste à la frontière, la nuit précédente, et une seconde après m’être glissé sous la bâche, je m’étais endormi profondément. J’avais besoin de sommeil après ces trois semaines à Tijuana, et je ronflais encore lorsqu’ils ont retiré la toile pendant que le moteur refroidissait. Ils ont soudain aperçu un pied et, en tirant dessus, ils m’ont flanqué par terre. J’ai essayé de blaguer, mais ça n’a pas pris. Le coup était raté. Ils m’ont quand même donné une cigarette et j’ai filé à la recherche de quelque chose à manger.
C’est alors que je suis tombé sur la « Taverne des Chênes-jumeaux ». Ce n’était qu’une de ces gargotes comme il en existe des millions le long des routes californiennes. Il y avait, d’une part, la salle du restaurant, de l’autre, la maison où ils habitaient. Sur un côté, la station d’essence et, derrière, une demi-douzaine de bicoques qu’ils appelaient « le refuge des autos ». Je suis entré dans le restaurant en coup de vent, puis je suis sorti et j’ai anxieusement scruté la route. Quand le Grec s’est montré, je lui ai demandé s’il n’avait pas vu un type avec une Cadillac. Je lui ai dit qu’il devait me prendre et que nous devions déjeuner ensemble.
— J’ai vu personne, a dit le Grec.
Il a mis un couvert sur une des tables et m’a demandé ce que je désirais. J’ai choisi un jus d’orange, des corn-flakes, des œufs frits et du bacon, un enchilada, des flap-jacks et du café.

— Hé, dites, il faut que je vous dise… Si mon copain n’arrive pas, faudra me faire crédit. C’était sa tournée ! Moi, j’ai plus le rond.
— Vas-y, bouffe toujours !
J’ai vu qu’il avait compris, et je n’ai plus parlé du type à la Cadillac. Il a repris :
— Qu’est-ce que tu fais comme boulot ?
— Oh ! n’importe quoi ! Pourquoi ?
— Quel âge qu’t’as ?

— Vingt-quatre ans.
— C’est jeune. Mais j’peux utiliser un type jeune… dans mon commerce.
— C’est pas mal, ici !
— Il y a un air ! C’est épatant ! Pas de brouillard comme à Los Angeles. Pas de brouillard du tout. C’est bath, et il fait clair !
— Ça doit être chic la nuit. Je vois ça d’ici.
— Et on dort !… Tu t’y connais en automobile ? Tu sais réparer ?
— Bien sûr. J’suis né mécano !

Il m’a encore parlé de l’air et de sa santé qui était si bonne depuis qu’il avait acheté ce coin-là. Il m’a expliqué qu’il ne comprenait pas pourquoi ses aides ne voulaient jamais rester chez lui. Moi, je comprenais très bien, mais je n’ai rien dit et je suis resté à cause de la boustifaille.
— Hé ! T’aimerais pas rester ici ?
Mais quand il m’a demandé ça, j’avais bu mon café et allumé le cigare qu’il m’avait offert ; alors j’ai répondu :
— C’est que… voilà, on m’a proposé deux autres places… C’est ça qui m’embête. J’y réfléchirai. Oui, j’y réfléchirai sérieusement.
C’est alors que je l’ai vue. Jusque-là, elle était restée derrière, dans la cuisine, et elle n’est venue dans la salle que pour prendre mes assiettes sales.
Son corps mis à part, elle n’était pas d’une beauté folle, mais elle avait un certain air boudeur et des lèvres qui avançaient d’une telle façon que j’ai immédiatement eu envie de les mordre.

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