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Bouquin-quizz n°17

Publié par le 10 avril 2015

 

Bonjour à tous.
Voici un extrait de… Je veux dire d’un livre de…
Non. Finalement, je ne vais pas vous l’indiquer. Ça vous amusera peut-être d’essayer de deviner.
Et si ça ne vous amuse pas, je vous conseille de le lire quand même. Ça vaut !

Je ne vis qu’un homme sur le radeau en dehors de moi. Il gisait à plat sur l’arête du toit de la cabine, la tête en bas, les bras étendus des deux côtés, tandis que la cabine même avait été renversée comme un château de cartes. La forme inerte était Herman. Il n’y avait aucun signe de vie à bord, pendant que les masses d’eau continuaient à se déverser sur le récif. Le mât de bois dur à tribord avait été brisé comme une allumette et l’espar supérieur avait écrasé dans sa chute le toit de la cabine. Il pendait maintenant avec tout son gréement par-dessus le récif, du côté tribord. A l’arrière, le bloc de bois sur lequel reposait l’aviron de gouverne était tordu et l’aviron avait volé en éclats. Les solides planches de la proue avaient été brisées comme des boîtes à cigares. Le pont entier avait été arraché et plaqué avec les caisses, les bidons, la toile et le reste de la cargaison contre le mur qui formait le devant de la cabine. Des bambous brisés et des bouts de corde émergeaient de partout. L’ensemble donnait l’impression d’un complet chaos.

Je sentis un frisson d’angoisse courir dans tout mon corps. A quoi bon m’être cramponné là ? Si je perdais un seul homme ici, à la fin de l’expédition, tout le reste me serait égal, et pour le moment, après le dernier coup de lame, je ne voyais plus une seule forme humaine. A cet instant, le corps plié en deux de Torstein apparut à l’extérieur du radeau. Suspendu comme un singe dans les cordages au sommet du mât, il réussit à reprendre pied sur les troncs, d’où il grimpa jusqu’au fouillis devant la cabine. Herman alors tourna la tête et m’adressa une grimace encourageante, mais ne bougea point. Je demandai en criant où étaient les autres, et la voix calme de Bengt me répondit que tout le monde était à bord. Ils s’accrochaient aux cordages derrière la barricade que formait l’épais treillis du pont de bambou soulevé.

Ceci se passa durant le peu de temps que le radeau se trouva en dehors du chaudron des sorcières. Mais une nouvelle lame s’approchait déjà. Pour la dernière fois je hurlai : « Cramponnez-vous ! » au milieu du tumulte, et c’est tout ce que je pus faire moi-même, tandis que je disparaissais dans les masses d’eau qui passèrent sur moi pendant deux ou trois éternelles secondes. J’avais mon compte. Je vis que les bouts de troncs se cognaient contre un sommet aigu du récif de corail sans pouvoir le franchir. Puis le ressac nous éloigna de nouveau. Je vis aussi que deux de mes camarades étaient aplatis sur le toit de la cabine, mais cette fois aucun ne souriait. Derrière le fouillis de bambou, j’entendis une voix calme crier :
« Ça ne va pas.»
Et j’éprouvai le même découragement. Le haut du mât ayant plongé de plus en plus du côté tribord, je me trouvais maintenant suspendu à une corde lâche en dehors du radeau. La lame suivante arriva. Après son passage, j’étais si mortellement fatigué que ma première pensée fut de remonter sur les troncs et de me coucher derrière la barricade. Au moment du remous, le récif rouge et rugueux se montra pour la première fois à nu devant nous et j’aperçus Torstein qui, toujours accroché à un faisceau de bouts de cordages, se tenait courbé en deux sur les coraux brillants. Knut, debout à l’arrière, allait sauter. Je lui criai qu’il fallait rester sur les troncs, et Torstein, qui avait été emporté malgré lui par une lame, remonta d’un bond comme un chat.

Deux ou trois vagues encore nous submergèrent, mais avec une force décroissante et je ne me rappelle plus ce qui se passa ensuite, sauf que l’eau affluait et refluait en bouillonnant, et que je glissais de plus en plus vers le récif rouge au-dessus duquel nous portaient les vagues. A la fin il n’y eut plus que des tourbillons d’écume et d’embrun, et je pus reprendre ma place à bord, où nous nous efforçâmes tous d’atteindre les arrière-bouts des troncs, qui étaient le plus haut perchés sur le récif.

Au même instant, Knut prit son élan et sauta dehors, tenant le filin qui pendait à l’arrière. Pendant le remous, il se hâta de patauger jusqu’à une distance d’une trentaine de mètres ; il s’y tenait en sécurité au bout de la corde quand la lame suivante vint jeter son écume vers lui, s’écroula, puis comme un large ruisseau se retira du récif plat.

Alors Erik sortit en rampant de la cabine effondrée, ses souliers aux pieds. Si nous avions tous suivi son exemple, nous nous en serions tirés à bon compte. Comme la cabine n’avait pas été emportée, mais s’était simplement couchée sous la toile, Erik était resté tranquillement étendu au milieu de la cargaison, écoutant les coups de tonnerre qui retentissaient au-dessus de lui pendant que les murs de bambou se penchaient de plus en plus. Bengt avait attrapé une légère contusion au moment de la chute du mât, mais s’était arrangé pour ramper sous la cabine démolie à côté d’Erik. Nous aurions dû tous les imiter, si nous avions compris d’avance que les innombrables amarres et le treillis de bambou resteraient solidement fixés aux troncs principaux malgré la pression de l’eau.

Erik se tenait tout prêt à l’arrière des troncs et, quand la vague se retira, il sauta sur le récif. Ce fut ensuite le tour d’Herman, puis celui de Bengt. Chaque fois le radeau était poussé plus loin, et quand vint notre tour, à Torstein et à moi, il s’était si bien posé sur le récif que nous n’avions plus aucune raison de le quitter. Tout le monde se mit au travail de sauvetage.

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