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Fion National

Publié par le 15 avril 2015

 

Au comptoir du Café des Trois-Pigeons, on découvre Blancassine (42 ans, chômeuse en fin de droits), Beaujole (36 ans, pré-retraité) et Calvadet (invalide pensionné) ; en face d’eux se tient le cafetier Fricandot, une bouteille à la main ; à leur droite, la vitrine constellée d’autocollants publicitaires donne sur une nuit pluvieuse ; derrière le groupe, la salle est obscure, lampes éteintes par mesure d’économies.

Blancassine :
(Se grattant la toison d’aisselle)
Ceusses qui croivent que comme quoi la dit-se-pute entre le père et la fille Le Pen, c’est comme quoi de l’en tour de loupe et de la groupie de chansonnier, laisse-moi t’dire qu’à mon sens ils se fourragent le doigt dans l’oigne. Et au grand large, n’encore !

Calvadet :
Ah ça : La poutre du voisin cache souvent la forêt…

Beaujole :
(De l’index, il fait signe à Fricandot de remettre la tournée)
Tu noteras que c’est dans les familles qu’on se chicore le plus sur le mode violent. Tiens, moi, mon beau-frère, il s’est pris la patate avec sa fille, quelque chose de tempétueux !

Blancassine :
Je raie-sume : le vieux Le Pen, il a jamais voulu accéder à les lycées. Mettre eul bordel dans les six thèmes, ça lui a suffi, merci bien. Sa fille, al’ veut voir la près si y danse, elle. Les voitures de ponction, les causettes ’vec les embarrasseurs z’étrangers, les dîners aux frais de la gonzesse et tous les aut’ trésors de la raie-publique…

Calvadet :
(De l’index, il fait signe à Fricandot de remettre la tournée)
Ah ça : C’est la grenouille qui se veut aussi grosse que l’œuf…

Beaujole :
Sa fille, c’est tout le portrait de sa mère. Et sa mère, je la connais : c’est ma sœur. Sur la terre entière, y’a pas plus casse-kiwis. Si tu veux quelqu’un pour te gâcher le match du dimanche, cherches plus : t’as trouvé !…

Blancassine :
Le père y dit une couennerie anti-mimétite alors la fille elle en profite pour l’esseclure et gueuler partout qu’al’ en veut pas pour rien immonde à la résidence de la région du Pacha. Là-dessus, tous les zob-servateurs y disent : y croyez pas, c’est une main d’œuvre à la maque-Javel…

Calvadet :
Ah ça : A noyer son chien on craint l’eau froide !

Beaujole :
Mon beau-frère, il a juste dit : « moi, quand Marine elle cause, je suis d’accord ». Ce fracas dans le Landerneau ! Sa fille, elle lui a jeté le Boursin aux fines herbes dans la gueule et elle a claqué la porte en le traitant de fasciste !

Blancassine :
Y s’gourent du tout au bout ! Y’a pas d’anguille sous la cloche. La fille al’ veut vraiment ratatisser le vieux. Et la vérité, c’est que ceusses qui s’gourent, y se gourent passe qu’y veulent bien s’gourer. Que ça soille de goître comme de fauche, y veulent pas d’la des diables en bol y z’y sont. Y n’en veulent, du diab’ ! Il est pratique, eul diab’ !

(De l’index, elle fait signe à Fricandot de remettre la tournée)

Jean-Marie Le Pen, c’est un éprouve à l’entaille. Si y disparaît de la cirque au cul lassions, ça s’ra fini d’crier au loup. Faudra se battre cont’ les fascistes sur c’qu’y disent vraiment et ces cons-là ne saveraient pas comment faire !

Calvadet :
Ah ça : Un tiens vaut mieux qu’un long discours !

Beaujole :

Depuis, la gosse dort chez son petit copain. Le père ne veut plus la voir. Il dit qu’il est insulté au plus profond. Pourtant, je témoigne : fasciste, il l’est, mon beau-frère…

Fricandot :
(s’approchant)
Celle-là, c’est la mienne !

Il remplit les verres.

 

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