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BLED, (Film) – 09

Publié par le 30 décembre 2017

 

Inspiré du roman « HAIG, Le sang Des Sirènes », Thierry Poncet, Editions Taurnada 2016.

https://www.taurnada.fr/

 

EXT Jour, cour

Haig désoeuvré. Il sirote du thé qui le fait grimacer dans un petit verre et fume.

La caméra s’éloigne de lui, de dos. Une silhouette en gandoura traverse le champ, furtive, se planque un instant derrière un pilier puis reprend sa progression vers Haig.

Haig boit une gorgée de thé et secoue le verre pour en faire tomber les dernières gouttes.

Retour à la silhouette. On s’aperçoit qu’elle tient un bâton en main, qu’elle lève en arrivant près de Haig.

Haig, inconscient de la présence. La silhouette encapuchonnée surgit et le fauche à l’arrière des genoux.

Haig tombe. Il laisse échapper le verre qui roule par terre.

La silhouette lève le bâton et, de l’autre main, sort de dessous la gandoura le colt chromé qu’elle braque sur le front de Haig.

Silhouette :
Tu es foutu, étranger ! Je te tue, moi, je te tue !

Haig :
Ferraj ?

Ferraj rejette la capuche de la gandoura en arrière, hilare.

Ferraj :
Tu y as cru, hein ?

Haig (soupirant) :
Putain…

Ferraj (rangeant le flingue) :
Tu t’es fait la trouille, hein ?

Il tend la main pour aider Haig à se mettre debout. Celui-ci s’en saisit.

Ferraj :
C’est qui le roi du camouflage, hein ? C’est Ferraj. C’est moi le roi du déguisement, d’accord ?

 

EXT Jour, porche

Zohra et Saïda s’apprêtent à partir. Vêtues de tuniques épaisses, elles terminent d’enrouler des ficelles dont elles chargent les rouleaux autour de leurs épaules.

Ferraj, toujours en gandoura, et Haig les regardent faire. Depuis l’enclos, Zineb s’approche, traînant le baudet au licou.

Ferraj :
Elles vont dans le bled chercher du bois pour qu’on se chauffe et pour le manger. Moi je vais chercher le manger. Il y a le village par là, à cinq kilomètres.

Il s’adresse aux deux femmes en arabe, les enjoignant de se presser ; Elles s’éloignent sans un mot.

Zineb s’immobilise devant Ferraj avec l’âne.

Ferraj empoigne Haig par les revers, l’attire contre lui et lui parle, visage contre visage.

Ferraj :
Toi tu répares la voiture et tu es sage, compris ?

Haig essaie sans succès de se défaire de la poigne.

Ferraj :
Je te connais, Français. Je sais ce qu’il y a dans la tête…

Haig continue de se débattre.

Ferraj :
Si tu t’en vas d’ici… Tu m’écoutes ?… Si quand je reviens tu n’es pas là, bien sage et tout et tout, je les tue tous les trois…

Il secoue Haig.

Ferraj :
Et après je te cherche. Et après je te jure je te trouve. Et après je te tire dans les couilles et après je te laisse crever. Tu as compris ?

Haig ne répond pas. Ferraj le secoue de plus belle.

Ferraj :
Est-ce que tu as compris ?

Haig (de guerre lasse) :
Okay… Okay… Dépêche-toi, tu as cinq bornes à faire.

Ferraj :
Bien…

Il lâche Haig, relève le bas de sa gandoura et saute sur l’âne.

Ferraj :
Rappelle-toi que Ferraj il tient toujours ses promesses, rappelle-toi !…

 

Ext Jour, bled

Plan sur les silhouettes de Zohra et Saïda sui s’éloignent dans la campagne.

 

EXT Jour, route

Plan sur la silhouette de Ferraj qui s’éloigne, à califourchon sur le baudet.

 

EXT Jour, porche

Haig se tourne vers Zineb. Contrechamp sur celui-ci qui le dévisage, impassible, les yeux vides.

Haig hausse les épaules, soupire et rentre dans la maison.

 

INT Jour, grange

Haig et Zineb s’affairent autour de la 504. Le premier balaie la banquette arrière des débris de verre, le second s’est glissé sous la voiture, à l’avant, examinant la roue faussée.

Haig sort les trois tomes des Misérables et les pose sur le toit de la voiture quand le jeune vient vers lui.

Par gestes, il lui demande un cric.

Haig :
Pff, je sais pas si j’ai ça…

Il ouvre le coffre. Aidé de Zineb, il en sort les deux roues de rechange. En fouillant au fond de la malle, il trouve un cric en losange qu’il donne à Zineb.

Celui-ci lui fait signe : la manivelle ?

Haig :
La manivelle… euh… attend…

Il fouille à nouveau le coffre, puis, ouvrant les portières, le dessous des sièges, puis adresse un signe d’impuissance à Zineb.

Haig :
Désolé, p’tit mec. J’ai pas ça en magasin.

Zineb hausse les épaules avec mépris, tourne les talons et sort de la grange.

Haig (bougonnant) :
Ben non, j’en ai pas de manivelle. Ça te défrise ou ça te défrise pas, j’en ai pas. J’ai des roues de secours, c’est déjà pas mal

Il examine en soupirant un des Misérables dont la couverture a été déchirée par la botte de Ferraj quand le gosse revient, porteur d’une manivelle rouillée.

Haig :
Ben tu vois quand tu veux…

 

INT Jour, grange

Le cric est monté. Haig et Zineb achèvent d’enlever la roue de son support. Zineb, un gros marteau de métal à la main, se couche pour se glisser dessous. Haig appuie sur l’aile pour tester la stabilité. La voiture oscille. Haig fait signe de faire attention au gamin qui lui répond d’un haussement d’épaule et disparaît sous le pont.

Haig s’assoit dans un coin. Sous la voiture, Zineb cogne avec son marteau. Haig observe la 504 bouger sous les coups, puis hausse les épaules et s’allume une cigarette.

 

INT Jour, grange

Couché sous la voiture, éclairé par une bougie collée au sol, Zineb cogne la pièce faussée avec le marteau. Des coups lents, forts, réguliers qui, par leur répétition, évoquent un glas de deuil.

 

INT Jour, garage

Á la porte, appuyé au chambranle pour profiter de la lumière extérieure, Haig tâche de lire Les Misérables. Derrière lui retentit le son régulier du marteau. Á ses soupirs et à la façon dont il relève les yeux de la page, on comprend qu’il a du mal à se concentrer.

Le chien maigre s’approche de lui et lui gronde dessus. Haig fait mine de lui donner un coup de pied. Le chien gémit peureusement, entre dans la grange et va se coucher près des pieds de Zineb.

 

INT Jour, cuisine

Haig fouille les étagères et l’intérieur des gamelles sans rien trouver. Il finit par trouver un bout de galette enveloppé dans des torchons. Il le porte à sa bouche mais, le trouvant trop dur, le repose.

Depuis la grange parvient le son lancinant du marteau.

 

EXT Jour, cour

Haig découvre un escalier. Au pied, un réduit de toilettes rudimentaires : un trou au sol et un grand bidon rouillé plein d’eau sombre.

Haig s’engage dans l’escalier.

 

EXT Jour, Terrasse

Haig débouche sur le toit, une vaste terrasse nue à l’exception d’un réservoir à eau de pluie et de cordes à linge, que cerne un muret bas. Il y a un broc d’alu bosselé posé au bord du réservoir.

Il se plante au bord, visage sombre, et observe le paysage.

La caméra suit son regard : panoramique sur un paysage uniforme de terres pelées, grisâtres, pauvrement parsemées de buissons. Le ciel est bas, sombre, menaçant de pluie.

Plus près de la maison : l’enclos de terre nue où se trouvent la vache et son veau entrevus la veille dans la grange et un puits rond à basse margelle de pierres irrégulières. Le chien, sorti de la grange, erre ça et là, cherchant on ne sait quoi.

D’en bas parvient toujours le klang… klang… klang… du marteau.

Il se dégage de l’ensemble une impression de misère et de tristesse.

Haig (soupirant) :
Tu parles d’un bled… C’est ça l’aventure ? (Il inspire et crie plus fort, exaspéré) C’est ça l’aventure, bordel ?!

En bas, le chien alerté par son cri se met à aboyer.

Haig amorce un geste d’exaspération puis se laisse tomber au sol, adossé au muret.

Le marteau : klang… klang… klang…

Haig ferme les yeux.

 

EXT Jour, Terrasse

Haig est endormi, toujours adossé au muret, un peu affaissé sur le côté.

On remarque (ou pas) que le marteau s’est arrêté.

 

EXT Jour, cour

Zineb sort de la grange, marteau en main. Il est essoufflé et en sueur.

GP sur le marteau.

Zineb s’engage dans l’escalier.


EXT Jour, terrasse

Haig endormi.

 

INT Jour, escalier

Zineb monte furtivement. Il débouche sur la terrasse.

 

EXT Jour, terrasse

Haig endormi.

GP sur le marteau.

GP sur le visage fermé de Zineb.

GP sur celui de Haig. Une mouche se balade sur sa joue.

 

EXT Jour, terrasse

La caméra s’élève, montrant les deux personnages : Zineb debout, immobile, devant Haig endormi.

GP sur Haig qui s’éveille, écarquille les yeux.

Plan de Zineb immobile.

Haig se redresse. Ses yeux examinent Zineb : sa face impassible ; le vent qui joue dans sa pauvre tunique maintenant maculée de cambouis ; ses pieds nus ; le marteau qui se balance au bout de son poing.

Retour sur Haig qui secoue négativement la tête.

Haig :
Non.

Zineb reste immobile encore une seconde, puis dépasse Haig, va au réservoir, pose le marteau sur le rebord, se saisit du broc, l’emplit, s’en verse sur le visage pour se rafraîchir.

Il tend le broc vers Haig dans un geste d’invite.

Haig refuse de la main.

Zineb hausse les épaules et s’asperge de nouveau le visage.

 

(Á suivre)

 

 

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