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Sur les traces de Cizia Zykë 05

Publié par le 30 octobre 2021

 

En compagnie de Mel, sa copine, notre pote David Brard poursuit ses tribulations à travers la péninsule d’Osa, Costa Rica, sur les traces de son enivrante lecture de jeunesse, Oro, et à la recherche de serpents, autre passion de ce drôle d’oiseau.

Amour, tu ne vas pas te coucher tout de suite ?
– J’en sais rien ma puce
, pourquoi ?
– B
en, euh… tu ne veux pas attendre un peu que je m’endorme ?
Et je te chante une chanson, aussi ?
Ooooh, arrête d’être con…
– Bien sûr ma puce.
Je rigole. T’inquiète pas, je reste un peu.

Je fume une clope assis à l’arrière de la voiture. Puis j’en descends avec l’intention d’aller pisser, lampe frontale sur la tête. Je n’ai pas fait trois pas que, soudain, face à moi, deux yeux reflètent à ma lumière. Je remballe le matos en coup de flip et saute dans la voiture récupérer la Maglite.
– Minou, lève toi !
– Qu’est-ce qui se passe ?
– Viens voir, il y a deux deux énormes tapirs qui vont vers la plage. Ils sont juste là.

On les a approchés doucement avant qu’ils ne disparaissent dans l’obscurité. Décidément, cette jungle est pleine de surprises. Au moment où nous allons nous coucher, nous entendons une voiture passer sur la piste et s’arrêter devant la baraque des vieux cons.
Les flics.
Je pense que la nuit va être courte.

On attend plus d’une heure, marchant le long de la plage pour tuer le temps, persuadés que nous aurons bientôt de la visite.
Et effectivement, vers une heure du matin, alors qu’on a fini par se recoucher, des sifflements nous parviennent.
– Hola ! Hola ! Polic
ia !
Et c’est r
eparti !
J’en étais sûr. Je sors du hamac, la tête dans le cul comme jamais, et j‘essaie de faire bonne figure.

Ils sont deux. Ils exigent qu’on leur file nos passeports. L’un des deux disparaît vers la bagnole.
– Qu’est-ce qu’ils font ?
– Rien
, ma puce. Ils nous passent aux fichiers pour vérifier si on n’est pas recherchés.
Celui des deux flics qui est resté nous questionne.
– Qu’est-ce qui c’est passé avec K
? (je vais taire son nom pour la suite de l’histoire)
– Nous sommes des passionnés d’animaux et nous faisons des photos. Il nous a demandé de partir car nous étions soi
disant chez lui. Mais nous n’avons pas vu de panneau. Après ça, il nous a menacés avec une pierre.
Le f
lic à une bonne tête. Il me demande :
– Vous avez filmé ?
– Oui.
Mel lui montre une brève vidéo de l’histoire. Le flic me regarde et me pose une question très ina
ttendue :
– Est-ce que K vous
a parlé en français ?
Je lui répond
s que non. Et dans l’instant je comprends qu’en réalité, ce vieil enculé comprenait très bien ce que nous disions. Et ceci d’autant mieux que c‘est un Français !

Le deuxième flic sort de la voiture et nous rend nos passeports. Il nous pose quelques questions sur notre traversée du Panama, intrigué par l’annulation du tampon panaméen par la police de l’immigration. On lui explique l’origine de l’affaire, sur laquelle je ne m’étendrai pas, l’essentiel étant que, sur ce point, nous n’avons rien à nous reprocher.
De acuerdo… Combien de temps allez-vous rester ici ?
On a prévu quatre nuits de bivouac.
– Bueno…
J
e profite de la détente de l’atmosphère pour leur demander si ce foutu chemin est privé ou non. Le flic à la bonne tête me dit que non. Il est d’autant plus public qu’il mène à un hôtel, La Luna Lodge.
Je le savais !

Ils finissent par partir sans rien nous demander de plus et surtout, à ma grande surprise, pas une question à propos de la machette.
Ils sont restés près de trois heures avec les vieux après être passés devant notre bivouac. Qu’est-ce qu’ils ont bien pu se raconter tout ce temps ? Et tout ça pour nous laisser tranquilles si rapidement !
Ça restera un mystère…

Le lendemain matin, après cette nuit agitée, la mer s’offre à nous sous un soleil orangé.
Nous sommes assis face à l’océan, café à la main. C’est notre premier matin. Les rayons du soleil percent l’épaisse brume
, laissant progressivement apparaître la verdure de la jungle. Au dessus de nos têtes, les aras macao s’envolent. Leurs cris s’entremêlent au bruit du vent dans les palmiers. Les basilics sortent de leurs tanières pour profiter des premiers rayons.
Le sable noir de la plage
.
L
a chaude douceur du vent.
L
a rivière.
L
a violence des vagues.
Malgré mes efforts, je ne trouve pas les mots. Ces instants, il faut les vivre pour les comprend
re.
C‘est ce que nous faisons.

C’est le moment de nous livrer à nos premiers repérages. Nous démarrons la voiture et retournons vers la piste d’atterrissage. Malheureusement nous sommes obligés de repasser devant la case de notre ami K, alias le vieux pourri. Assis sur sa chaise en plastique, il nous regarde passer mais n‘esquisse pas un geste.

Nous roulons jusqu’au lit d’une large rivière asséchée, puis entamons les montagnes de Corcovado sur des chemins boueux et rocailleux. Les quelques habitations que nous croisons sont faites de bâches et de bambous. Devant l’une d’elles, un homme planté sur le bord de la piste, nous fait signe de nous arrêter.
– Eh
, mais je vous connais ! s’exclame-t-il. Je vous ai vus en ville.Vous êtes les deux Français qui cherchent des serpents.
Les serpents m’ont souvent permis de faire des rencontres inattendues. Qu‘ils aiment ou non les reptiles, mes recherches laissent rarement les gens indifférents.
On est venus ici pour trouver de nouvelles espèces.
– Vous serez servis, me dit-il. Mais faites bien attention à vous, les fers de lance sont partout.
C’est noté. Ne pas oublier que nous sommes à 2h30 de l’hôpital le plus proche. Il est évident que nous ne devrons prendre aucun risque. D’où l’importance du repérage en journée.
– Di
s-moi, amigo, j’ai une petite question à te poser : connaistu K qui habite en bas de la colline ?
– Oh que oui
!
Dernière lui,
des Ticos qui sont sortis de la cabane pour écouter notre conversation sont morts de rire. Le type m’explique que personne n’aime K qui est un vieux con aigri. Ce qui ne m’étonne pas, vu l’accueil qu’il nous a réservé hier soir.
Le type ayant l’air sympathique, je décide de laisser la voiture ici, devant chez lui, et nous continuons notre route à pieds.

On enquille le premier chemin qui s’offre à nous.
Bientôt, nous arrivons à une petite rivière entre deux remparts de végétation fournie. Typiquement le genre d’endroit où nous pouvons trouver du serpent corail.
A
près quelques minutes d’observation, je comprends que ce cours d’eau ne s‘est pas creusé naturellement. Les rochers qui en forment les rives sont soigneusement empilés les uns sur les autres.
Je fais la réflexion à Mel qui
en tire la même conclusion que moi : nous sommes devant une ancienne rivière d’oreros.

Un peu plus haut, il y a une case complètement démolie. Le toit, ou plutôt la bâche qui en faisait office baigne dans la bouillasse. Super : les endroits abandonnés de ce type sont d’excellents refuge pour les reptiles et les scorpions.
Devant ce qui reste de la case, il y a une sorte de table
complètement vermoulue. Au moment où je la touche de mon crochet pour la dégager, elle s’écroule sous son propre poids, nous permettant de découvrir notre premier scorpion qui était planqué sous les planches pourries.
Nous prenons quelques photos.

En détaillant ce qui reste du meuble écroulé, je repère un bout de grillage et un morceau de tôle. Ce n’est pas une table, mais un tamis de chercheur d’or !
Ma curiosité me pousse à continuer les recherches.
À quelques pas de là, je trouve un trou dans le sol. Probablement des chiottes. Au fond repose une canette de bière que je récupère. La date de péremption sur la boîte me renseigne sur l’époque cette case d’oreros était en activité.
Il est écri
t 2020.

Eeeeeh, l‘or de Corcovado n’est peut-être pas qu’une histoire du passé !

 

(À suivre)


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