browser icon
You are using an insecure version of your web browser. Please update your browser!
Using an outdated browser makes your computer unsafe. For a safer, faster, more enjoyable user experience, please update your browser today or try a newer browser.

La dès qu’ça danse…

Publié par le 1 avril 2015

 

Au comptoir du Café des Trois-Pigeons, on découvre Blancassine (42 ans, chômeuse en fin de droits), Beaujole (36 ans, pré-retraité) et Calvadet (invalide pensionné) ; en face d’eux se tient le cafetier Fricandot, une bouteille à la main ; à leur droite, la vitrine constellée d’autocollants publicitaires donne sur une nuit pluvieuse ; derrière le groupe, la salle est obscure, lampes éteintes par mesure d’économies.

Blancassine :
(Se grattant la toison d’aisselle)
J’vas vous l’bonnir comme ça m’est v’nu : la merde par chez nous, elle a commencé avec l’aut’ penseur normand, là, Jean-Paul de la Sarthe. Ce serait que moi, les existentiallisses, y z’auraient t’été foutus en cellule badigeonnée, et sans permis de s’en sortir, encore !

Calvadet :
Ah ça : Le néant précède l’existence…

Beaujole :
(De l’index, il fait signe à Fricandot de remettre la tournée)
Sans compter que sa gonzesse, elle a pas été la dernière à mettre le souk dans le Landerneau. « Le Deuxième Sexe », rien que le titre, tu vois la couleur du truc ? Les bonnes femmes ont commencé à se prendre la calebasse, forcément !

Blancassine :
On n’veut plus de si-je-t’aimes, on refuse toutes les colles de pensée, on proclame comme quoi rien n’est sûr… Ouais… Moi j’dis qu’tout ça c’est des prétèsques à n’plus rien fout’ eud d’ses dix doigts. Quand tu t’dis qu’à quoi ça sert si ça sert à rien…

Calvadet :
(De l’index, il fait signe à Fricandot de remettre la tournée)
Ah ça : La nausée s’attrape en huis clos…

Beaujole :
« On ne naît pas femme, on le devient ». Tu parles d’un bobard en soldes ! T’as qu’à en causer à mon beau-frère. Trois enfants, trois filles. Trois, le pauvre ! Sans compter ma sœur qu’a jamais été la dernière pour le casse-noix…

Blancassine :
On commence par siruper des coquetèles au rhum en écoutant des solos de trompinette dans l’pré d’Saint-Germain et puis au total, quéques z’années plus tard, c’est les pavés sur les flics et la crévolution comme quoi qu’on peut tout s’permette !

Calvadet :
Ah ça : On n’attrape pas les mouches avec les mais sales !

Beaujole :
Résultat, chez eux, c’est toute la journée la foire à la pinaille et le crêpe chignon à chaque étage. Faut se faufiler entre les tirs de bigoudis. Mon beau-frère il dit qu’elles ne sont peut-être pas nées femmes mais que c’est sûr qu’elles sont nées chiantes. Et pourtant ; il n’est pas philosophe, mon beau-frère !

Blancassine :
Comme quoi y z’auraient voudru la justice sociale !… Me faites pas marrer, j’ai les lèvres percées ! Tout ce qu’y voulaient, c’tait la liberté du sèquse, le vortement à tire le haricot et l’divorce à l’aimable. Quand tu r’gardes bien, la justice sociale, c’est rien qu’une idée d’bourgeois !

(De l’index, elle fait signe à Fricandot de remettre la tournée)

Tu t’souviens d’la photo du gugusse de la Sarthe perché sur son tonneau à vendre des z’harengs t’aux z’ouvriers ? « Faut pas désespérer Billancourt » qu’y disait, ce clown. Ah ben grâce à lui, ça risque plus : ils z’y ont fermé, Billancourt !

Calvadet :
Ah ça : Les chemins de la liberté, ça passe par le mur !

Beaujole :

Je dois reconnaître qu’elle a pas trop tiré sur la ficelle, la mère Beauvoir. C’est vrai, quoi : après le succès du Deuxième Sexe, elle aurait pu torcher le Troisième Sexe, le Quatrième Sexe, et ainsi de suite… De nos jours, elle aurait cartonné en série télé !

Fricandot :
(s’approchant)
Celle-là, c’est la mienne !

Il remplit les verres.

 

Laisser un commentaire