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LA MARIE-BARJO – Épisode 21

Publié par le 24 septembre 2022

 

D’après Le Secret Des Monts Rouges, roman paru aux éditions Taurnada.

 

EXT Jour, pont de la Marie-Barjo

Haig se démène ridiculement pour interrompre son jet d’urine et remonter sa braguette.

Haig :
ALERTE !

Contrechamp : sur la rive, près de deux gros rochers, l’un des deux types en vieil uniforme Khmer rouge sur la berge épaule sa Kalach.

Champ : Haig tire en l’air et se jette de tout son long sur l’étroit plat-bord.

Haig :
Alerte ! En poste, bordel de merde !

Une rafale de trois balles passe au-dessus de lui en sifflant.

Une nuée d’oiseaux blancs affolés s’envole d’un arbre proche dans un battement assourdissant.

Haig :
En poste !…

 

Banc-titre :

Bang devait se placer à la proue. Bozo à l’arrière.

Kim devait foncer à la barre et mettre toute la gomme pour nous tirer le plus vite possible du mauvais pas.

On avait répété la manœuvre plusieurs fois.

En rigolant.

 

EXT Jour, pont

Bang jaillit de la cale, baudrier déjà bouclé autour de son énorme torse, AK 47 à la main. Ses gestes sont ceux d’un combattant aguerri. Il s’accroupit, arme et lève le poing, pouce en l’air.

Bang :
BON POUR MOI !

La caméra file du côté de la timonerie. Bozo en sort en courant vers son poste, à la poupe. Ses gestes sont l’exact opposé de ceux de Bang : fébriles et maladroits. Le baudrier non bouclé flottant autour de son maigre torse, il s’acharne à enclencher son chargeur tout en courant, sans même penser à se pencher.

Haig (hurlant) :
Couche-toi, Bozo !

Il s’immobilise. GP sur son visage. On voit ses yeux s’écarquiller alors qu’il découvre les silhouettes des assaillants sur la rive. Un réflexe le jette sur la tôle. Juste à temps. Une nouvelle rafale strie l’air là où se trouvait sa tête une microseconde plus tôt et rebondit sur la paroi de la timonerie.

Derrière la vitre de celle-ci, on aperçoit Kim. Il vient de se mettre à la barre.

Haig prend une grande inspiration et bondit sur ses pieds. Il se précipite vers la timonerie. Une rafale crépite sur la tôle, juste derrière mes talons. Il se propulse sur le toit. Il y rampe et s’installe en position de tir couché, son arme braquée vers les agresseurs.

Haig (pris par la trouille) :
Merde.

Contrechamp : d’autres gars en uniforme Khmer rouge sont apparus aux côtés des deux premiers. Un, deux, trois… Ils sont huit, alignés sur la berge, hérissés d’armes, les pieds dans l’eau.

Champ : couché sur le toit de la timonerie Haig cogne frénétiquement du poing sur la tôle.

Haig :
KIM, DÉMARRE !

 

EXT Jour, pont

Plans courts successifs sur les trois hommes qui ouvrent le feu en même temps. Il y a un contraste entre Bozo, qui flingue comme un dératé et les deux autres, qui tirent en rafales appliquées.

 

EXT Jour, rive

Les assaillants se sont tous planqués, quasiment invisibles, qui dans les taillis, qui dans les roseaux. Les impacts des tirs de l’équipage de la Marie-Barjo se perdent dans la nature.

 

EXT Jour, pont

Les trois hommes continuent de tirer.

Haig :
STOP !

Les tirs cessent. Plan sur Bozo de nouveau en train de se battre avec son arme, enclenchant maladroitement un nouveau chargeur.

INT Jour, timonerie

 

Kim, à la barre, appuie du pouce sur le bouton orange du démarreur. Rien. Il réappuie plusieurs fois. Sans succès.

Kim (gémissant) :
Merde de merde de merde…

 

EXT Jour, rive

Un petit costaud surgit d’un bond de derrière une souche et crie un ordre. Les sept autres réapparaissent, fusils épaulés, leurs gueules noires pointées sur la Marie. Le petit tient un pistolet qu’il braque à son tour.

 

EXT Jour, toit de la timonerie.

Haig, l’œil dans son viseur. Soudain, celui-ci s’écarquille un instant. Haig rabaisse un peu son arme pour observer, les sourcils froncés.

Haig (marmonnant) :
Qu’est-ce que c’est, ce couteau ?

 

EXT Jour, rive

Plan sur le petit gros qui commande l’attaque, son flingue braqué sur la Marie. GP sur la ceinture à laquelle pend, en travers de l’aine du gars, un objet qui ne devrait pas s’y trouver. Un poignard.

Énorme, le couteau. Long et large comme une machette. Dans une gaine de peau décorée de perles bleues. Avec des franges qui pendent. Un poignard amérindien. Ici, en pleine jungle d’Asie. Qui plus est une arme à l’évidence neuve. Chère. A la ceinture d’un misérable coureur des bois.

 

EXT Jour, toit de la timonerie

Haig cogne de nouveau du poing sur la tôle.

Haig :
Kim, qu’est-ce que tu fous ?

 

INT Jour, timonerie

Kim, désespéré, appuie frénétiquement sur le bouton du démarreur tandis que les coups de poings de Haig retentissent au-dessus de sa tête.

Kim (hurlant) :
Haig, ça marche pas !… Le démarreur… ça marche pas !…

 

EXT Jour, toit de la timonerie

Haig se passe brièvement la main sur le visage.

Haig :
Putain de démarreur !

Un véritable déluge de balles s’abat autour de lui. Les balles rebondissent sur la tôle du bateau, claquent et miaulent.

 

EXT Jour, rive

Les salopards tirent à volonté. Fusils réglés en rafales continues. A fond les chargeurs. Des myriades d’éclairs jaillissent des canons de leurs armes.

 

EXT Jour, Marie-Barjo

Haig couché sur son toit, aplati au maximum. Il tourne la tête.

Haig (hurlant) :
Manivelle, Bang, manivelle !…

À l’avant, Bang bondit au fond de la cale. On le voit disparaître par le trapon qui mène au moteur.

Marisol fait irruption du carré et court prendre sa place à la proue, courbée et enoux fléchis, une Kalachnikov dans les mains.

Haig :
Non, Marisol !

Elle secoue négativement la tête tout en armant son AK d’un geste précis de soudard expérimenté.

Haig :
Marisol, à fond de cale ! C’est un ordre !

Elle lui adresse un doigt d’honneur, épaule et tire une rafale de trois balles.

 

INT Jour, cale

Dans l’obscurité, Bang ajuste la longue manivelle de démarrage sur le moteur et commence à tourner.

 

EXT jour, rive

Le chef Khmer Rouge, le petit costaud au poignard de Sioux, se tient accroupi derrière une grosse souche de bois. Il se lève, tire une balle de son Tokarev, beugle des encouragements à ses hommes d’une voix aiguë et se recroqueville de nouveau.

Deux hommes sont planqués derrière le groupe de rochers. Les espaces entre les pierres leur font des meurtrières naturelles. Ils n’ont pas besoin de se découvrir pour tirer.

Quatre autres sont cachés dans l’épaisseur des roseaux, se levant et se rabaissant par groupes de deux. L’un de ceux-là est plus grand que la moyenne. Un échalas très maigre, aux côtes apparentes, torse nu, en short, coiffé d’une casquette chinoise à étoile rouge.

Enfin, allongé sur une branche, il y a un gars très jeune, à peine un adolescent, qui manie un antique fusil d’assaut muni d’un chien qu’il ne cesse d’activer pour recharger.

 

INT Jour, cale

Bang tourne la manivelle à grands à-coups.

 

EXT Jour, Marie-Barjo

Toute la péniche est sous le feu.

Le moteur tousse. Une fois. Deux fois. Enfin, il se met à ronronner.

Haig :
Marisol, relève l’ancre !

Marisol lâche son arme, empoigne la chaîne et se met à tirer comme une sauvage, sans souci des balles qui s’abattent autour d’elle.

Haig (cognant sur le toit) :
Kim, les gaz à fond !

Aussitôt, le moteur rugit. La Marie-Barjo s’élance en avant.

La rive commence à défiler. La péniche s’éloigne déjà des assaillants quand le grand maigre torse nu envoie dans sa direction une boule qui passe au-dessus de Haig et tombe dans la cale.

Haig (hurlant) :
GRENADE !

Le bruit de l’explosion dans cette caisse de métal est énorme.

À l’arrière, Bozo se dresse d’un bond, une de ses grenades à la main.

Haig :
Bozo, non !

Bozo dégoupille son engin et le lance vers les roseaux.

 

EXT Jour, rive

Le lancer est trop court. La grenade tombe dans l’eau où elle saute avec un bruit sourd, soulevant une gerbe de flotte et d’écume.

Après s’être abrité un instant, le grand maigre épaule son fusil-mitrailleur.

Plan sur les trois flammes de son tir.

 

EXT Jour, Marie-Barjo

On suit les trajectoires de ces trois balles. La première rebondit sur la timonerie et file en sifflant. Une autre se perd dans la nature.

La troisième balle fait exploser la tête de Bozo.

 

(A suivre)

 

 

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