CHUPA ME
LA VIDA
La vida esta
Una polonga
Ay, querida,
Chupa me la vida !
(La vie, c’est une grosse pine,
Oh, chérie, suce-moi la vie !)
Baïla, elle danse,
La petite fille de joie,
La fille de peine.
C’est dans les faubourgs de Bayamo
A Cuba.
Là que le Hobo il traîne.
Sait même pas ce qu’il fait là.
Baïla elle danse,
Quasi nue
Petite brune aux cheveux courts
Jolie fleur
Les seins pointus,
Deux pommes d’amour
à queues
Noires,
Les yeux rieurs,
Quasi noirs.
Baïla elle danse, se déhanche plutôt
Il se dit rigolant le Hobo,
Pobrecita (la pauvre !)
Sur la rumba
Qui gicle du magnéto.
Souvent elle porte la main, souvent
Entre ses cuisses
Toujours se dandinant
Sourire de faux vice
Joué
Mal joué
Se touche du bout des doigts
Trois ombres, des duvets, des soies
Aussitôt relève les bras jusque derrière
Sa tête
Geste ample, circulaire
Qui se veut gracieux
N’est que bête
Lui fait la gogo dancer
La petite sœur,
Lui fait le grand jeu.
Le Hobo ça le dérange pas.
Baïla, petite, danse pour moi
Il pense
Baïla, querida (ma chérie), danse
Tandis qu’il mate Boulotte le suce
Des cinq filles du boxon
Elle était la seule tentée :
Vingt dollars yankees
Pour téter le sexe du blanc.
…
Lit de bois, natte d’osier.
Une moustiquaire rose trouée.
Une piaule de planches comme un placard,
Cloisons tapissées de journaux collés.
Deux cintres pour les nippes des petites,
Sur une étagère des brosses à dents
Un rasoir méchant,
La photo des parents d’une des deux
Dans un cadre en plastique bleu.
Le Hobo il attrape Boulotte au bras
La force à grimper sur le grabat
Son cul rond devant.
Le Hobo pour l’heure salopard
Bien vicelard,
Qui se fait son plan.
Dans le val à l’envers des cuisses
Ses seins roses, lisses,
Un rien pendant,
La rondeur de ses fesses,
L’ombre enfouie.
Et là-bas, la petite Baïla,
Sa joue qui glisse,
Ses cheveux qui caressent
Sa queue
Brandie.
…
La nuit torride dans le réduit
La moustiquaire pue la poussière.
Le
Noir.
La
Nuit.
Une lampée de rhum, la dernière.
Le noir la nuit
La
Solitude.
Baïla ronronne d’un côté,
Yeux fermés,
Peau sombre
Raide statue d’ébène
D’Afrique lointaine
Posée dans l’ombre.
A gauche, un coude au sol
Boulotte collée
Brûlante, molle,
La peau mouillée.
Le Hobo il pèse sur ses épaules,
La tourne,
La couche sur le dos,
La colle
L’ouvre,
Pénêtre la tiédeur de son con,
Fore,
Yeux ouverts dans le néant.
Baïla s’éveille, s’abat sur lui, gronde.
Le Hobo il s’arrache de Boulotte
Se coule contre Baïla
Dure,
Aussi flexible.
L’empoigne aux hanches,
Ouvre son cul de deux pouces
Durs,
Tâtonne, trouve, force,
L’encule à cœur.
La
Solitude,
Il se dit le Hobo,
La solitude, jamais plus froide,
Dure,
Noire,
Qu’à ces instants.