Inspiré du roman « HAIG, Le sang Des Sirènes », Thierry Poncet, Editions Taurnada 2016.
https://www.taurnada.fr/
EXT Jour, route
Plan sur la roue avant droite de la 504, avec l’aile broyée au-dessus, qui roule à reculons et s’arrête quand elle écrase un tapis d’éclats de verre brisé.
La caméra monte, le plan s’élargit, montrant la voiture entière avec les silhouettes des deux hommes à l’intérieur.
INT Jour, voiture
Ferraj remplit le barillet de son colt de balles qu’il puise dans la poche de son blouson. Ayant terminé, il referme le barillet d’un coup de poignet puis, tenant le flingue en l’air, il coupe le contact et prend les clés.
Plan sur Haig, à qui le geste déplaît.
Ferraj joue un instant avec le trousseau, le faisant danser devant son visage, un léger sourire narquois aux lèvres.
Plan rapproché sur les yeux de Haig.
Ayant compris que le garçon ne tenterait pas de reprendre ses clés, Ferraj ricane, referme le poing sur le trousseau et le fourre dans sa poche, avant d’ouvrir la portière.
Ferraj :
Allez viens. J’ai le 357 il me démange !
EXT Jour, route
Plan sur les boots de croco de Ferraj, avec derrière les Docs de Haig, tous deux marchant sur les éclats de verre.
Plan sur les yeux de Haig.
Plan sur la main de Ferraj fermée sur le colt.
Plan sur Ferraj qui pousse un ricanement.
Plan sur les boots qui s’immobilisent au bord de la route.
EXT Jour, route
Les deux hommes au bord de la route, surplombant la pente.
EXT jour, vallon
La caméra descend rapidement le long d’une pente assez raide, parsemée de rochers et de buissons, avant de se fixer sur la R 12 renversée, pliée sur le tronc d’un arbre.
La caméra s’approche, cadre une fenêtre dont s’extirpe avec peine un gros flic. Il est mal en point : une moitié de son visage est en charpie et il traîne une jambe paralysée dans un pantalon dégouttant de sang. Quand il est parvenu à sortir complètement de la voiture, il se retourne.
Le gros flic (appelant) :
Kader ? Ahmed ?
Des plaintes lui répondent de l’intérieur.
Le gros flic inspire et expire plusieurs fois pour rassembler ses forces. Il entreprend de ramper sur les coudes, montant le long de la pente. Ce faisant, il relève la tête et s’immobilise.
EXT Jour, vallon
Contre-plongée de Ferraj, debout jambes écartées en haut de la pente, avec Haig en retrait.
EXT Jour, vallon
Poussant un gémissement de dépit, le flic se redresse, sa jambe blessée tendue sur le côté. Sa main cherche à déboucler le holster qu’il porte à la ceinture.
EXT Jour, route
Ferraj lève le colt et vise, prenant exagérément son temps, yeux plissés et langue tirée, comme un élève appliqué.
EXT Jour, vallon
Le flic, ahanant, à bout de forces, est parvenu à déboucler le holster. L’arme est à demi sortie.
EXT Jour, route.
Ferraj tire.
Ferraj :
Bang !
EXT Jour, vallon
Touché à la poitrine, le flic est renversé en arrière. Il s’écroule sur le dos. La caméra s’attarde sur son corps agité de violentes convulsions.
EXT Jour, route
Vue en plongée de Ferraj qui descend dans le vallon en direction de la voiture. Passant devant le gros flic étendu, il lui tire une indifférente balle dans la tête. Le corps s’immobilise.
EXT Jour, vallon.
Ferraj arrive à côté de l’épave. On l’entend chantonner entre ses dents Rock The Casbah des Clash. Il s’accroupit et observe méthodiquement l’intérieur de l’habitacle.
Ferraj (à mi-voix) :
Rock the casbah… Rock the casbah…
Plan sur l’intérieur de la voiture. On doit voir : le chauffeur, mort ; le passager, vivant, visage ensanglanté ; le troisième, affalé le dos sur la banquette arrière, respiration râlante, le haut du crâne tourné vers Ferraj.
On voit l’arme s’avancer vers ce dernier, tandis que Ferraj continue à chantonner. Le canon se pose sur le haut du crâne.
Plan sur l’index qui presse la détente. Plan sur le chien qui s’abat. Détonation. Le crâne explose en une gerbe de débris de cervelle, de sang et d’os.
Sur le siège passager, le flic survivant hurle de trouille, bouche grande ouverte.
Ferraj fait valser le colt autour de son index, façon western, affecte de souffler sur le haut du canon et se redresse.
Ferraj :
Rock the casbah…
Il fait posément le tour de la R 12, alors qu’on entend le gars gueuler, et vient s’accroupir devant la portière.
Plan sur Ferraj qui observe sa victime.
Plan sur le flic, qui secoue la tête, paniqué.
Le flic :
Lla, lla (non, non) !…
Plan sur Ferraj, qui sourit.
Plan sur le visage du flic, dont les yeux s’écarquillent alors qu’il comprend que Ferraj va tirer.
EXT Jour, route
En plongée, du point de vue de Haig : Ferraj tire à l’intérieur de la voiture.
Haig est secoué d’un hoquet. Il porte la main à sa bouche. Nouveau hoquet. Il court deux pas en arrière, se détournant du vallon, et se plie en deux.
Gros plan de Haig qui vomit douloureusement.
Haig se redresse, le visage noyé de sueur, s’essuyant la bouche. Il se retourne.
Plan sur Ferraj qui l’observe, debout au bord de la route.
Haig sursaute de peur.
Ferraj :
Tu as un problème ?
Haig figé.
Ferraj désigne le fond du vallon du canon du colt.
Ferraj :
Tu as pitié de ces gens-là, c’est ça ?
Il s’approche de Haig dont on sent la peur.
Ferraj :
Y faut pas. Ces gens-là c’est pas des hommes. C’est des chiens. C’est les chiens de Hassan II !
Il tourne la tête et crache à terre, puis observe Haig trois secondes en silence.
Ferraj :
Quand tu entends le nom de Hassan II, tu dois cracher par terre, compris ?
Haig figé.
Ferraj lève le colt, sans le braquer directement sur Haig.
Ferraj :
Hassan II !
Haig remue la langue dans sa bouche. On comprend qu’il cherche de la salive.
Ferraj braque le flingue sur Haig.
Ferraj :
HASSAN II !
Haig crache par terre.
Les deux hommes s’observent quelques instants, puis Ferraj baisse son arme, saisit Haig par l’épaule et l’entraîne vers la voiture.
Ferraj :
Viens, il faut partir d’ici. Les autres chiens ils vont venir…
EXT Jour, route
Plan éloigné de la 504 le long d’une route.
INT Jour, voiture
Ferraj a ouvert sa boîte à gants et a posé le colt sur le couvercle. Chantonnant, le sac de jute de son butin béant sur les genoux, il en sort des liasses de billets qu’il contemple avec jubilation, hume et fait danser devant ses yeux.
Ferraj :
Rock the casbah…
Haig, au volant, regarde les billets du coin de l’œil. Ferraj s’en aperçoit et range les liasses dans le sac.
Ferraj observe un moment en silence Haig qui est mal à l’aise sous ce regard.
Ferraj :
Tu es jeune, hein ?
Haig :
Oui.
Ferraj :
Tu conduis bien pour ton âge.
Haig :
J’aime bien conduire.
Ferraj reprend le colt et joue avec, tournant le poignet dans tous les sens, puis son regard revient sur Haig.
Ferraj :
Eh ben conduis, alors !
EXT Jour, route
La 504 roule le long d’une route déserte.
(A suivre)
2 Responses to BLED, (Film) – 05