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BLED, (Film) – 17

Publié par le 18 mars 2018

 

Inspiré du roman « HAIG, Le sang Des Sirènes », Thierry Poncet, Editions Taurnada 2016.

https://www.taurnada.fr/

 

INT Jour, chiottes

Le pantalon aux genoux, pataugeant dans son sang mélangé de merde, Ferraj braque son colt sur le visage de Haig.

Haig :
Arrête avec ça.

Ferraj :
Je vais crever alors si tu fais les problèmes, si tu parles même une remarque qui me plaît pas, tu meurs avec moi, parole de Ferraj.

 

EXT Jour, patio

Haig a traîné Ferraj hors du réduit des chiottes et l’a couché sur le sol.

Suite de plans : Haig nettoie Ferraj en lui douchant le bas du corps avec de l’eau qu’il va puiser au bidon ; Ferraj gémissant de douleur, sur le point de s’évanouir, persistant à marmonner des menaces ; Haig rajuste le pantalon de Ferraj ; Haig aide Ferraj à se relever.

Le duo se dirige vers la chambre la plus proche, Haig soutenant Ferraj, qui a toujours le colt en main.

 

INT Jour, chambre Zohra

Le duo sur le seuil de la chambre vide.

 

INT Jour, chambre Saïda

Idem.

 

INT Jour, chambre Zineb

Idem.

 

EXT Jour, patio

Alors qu’ils passent à côté de l’attelage formé de la carriole attelée à la mobylette, Ferraj est pris de convulsions. Il se plie en deux, une main pressant son ventre. On doit croire un instant qu’il va se répandre dans son froc, mais il se détourne, vacille, se rattrape à un montant de la carriole et vomit avec des râles douloureux d’abondants jets de sang noir.

La crise passe, le laissant haletant, en sueur, tenant à peine sur ses jambes.

Ferraj :
– Saara… Saara… Saara…

Haig :
Qui c’est, Sara ?

Ferraj ricane. Son ricanement se transforme en toux. Du sang déborde de sa bouche.

Ferraj :
« Saara », ça veut dire « sorcière ». Tu ne connais pas les sorcières d’ici, toi. Tu ne connais rien, toi, hein ?… Les saaras elles te font faire des rêves à t’empêcher de dormir tellement tu as peur. Elles t’embobinent comme les grandes putes qu’elles sont… Reugh…Elles te font voir des choses qu’elles n’existent pas…

Haig :
Zohra ?

Ferraj hoche lentement la tête. GP : la sueur dévale sur sa face en épaisses gouttes rosées, comme si du sang s’y mêlait.

Ferraj :
Elle m’a empoisonné, hier soir… Ou peut-être qu’elle a commencé avant… Nardin bebek, c’est ma faute,… J’ai pas fait assez attention…
(du bout du flingue, d’un geste épuisé, il montre les alentours) Dans un gourbi comme ça, comment tu peux croire…

La pluie se fait soudain plus forte. Les gouttes s’écrasent en crépitant sur le patio.

Très long GP sur le visage de Ferraj.

Ferraj :
La pluie…Tu vas m’aider pour monter là-haut sur le toit. Je veux pas crever… dans ce trou à ordures. Sous le ciel, je veux. La gueule dans la pluie, ce sera bien.

 

EXT Jour, terrasse

Pluie battante.

Haig installe Ferraj le dos contre le bord du réservoir d’eau, pose à côté de lui une bouteille de gin qu’il portait sous le bras, lui glisse aux lèvres un joint, l’allume avec difficulté à cause de la pluie.

Ferraj tête goulûment.

Il empoigne la bouteille de gin, la décapsule, boit, la repose.

Il lève la tête, visage au ciel.

Ferraj (murmurant) :
Dieu.

Il lève le colt, le braque sur Haig.

Suite de GPs : le pouce qui relève le chien ; l’index crispé sur la détente ; le visage de Haig ruisselant de pluie, impassible.

Ferraj laisse retomber le flingue.

Ferraj :
Casse-toi, va !

 

EXT Jour, patio

Haig se dirige vers la cuisine. Un coup de feu retentit sur la terrasse. Haig s’arrête un instant puis reprend son chemin.

 

INT Jour, chambre

Haig récupère ses trois tomes des misérables, les fourre dans un sac plastique, y ajoute des boîtes de conserves, des paquets de gâteaux, une cartouche de cigarettes  et une bouteille dont il s’envoie au passage une longue rasade.

 

EXT Jour, patio

La pluie est encore plus forte.

Zohra et Saïda se tiennent devant le portail. Zineb est en train de dételer la remorque de la mobylette.

GP sur la main de Zineb intacte.

GP sur le visage de Haig qui réalise.

Haig :
Vous nous avez baisés, hein ?

Suite de flashes back : Zineb fait tomber la voiture ; Zohra étale un baume sur la main de Zineb qui se met à gonfler ; Zohra, Saïda et Zineb en conciliabule dans la chambre de Zohra ; Haig entrant dans la chambre, tandis que Zohra soigne la main de Zineb ; une main tatouée au henné verse une poudre dans un verre de thé ; Saïda joue la pute dans les bras de Ferraj.

Haig :
Depuis le début vous nous avez baisés.

Zineb maintient la mobylette par le guidon, invite du menton Haig à la prendre. Haig obéit.

Il se dirige vers le portail. Zohra ouvre le vantail devant lui.

Il sort, enfourche la mobylette, se retourne, grimaçant sous la pluie, vers le portail et Zohra qui l’observe depuis l’intérieur.

Haig :
Est-ce que tu es une sorcière ?

GP sur le visage de Zohra. Sur ses lèvres flotte un instant une ébauche de sourire.

Zohra ferme le vantail. Plan sur le portail fermé.

Haig, serrant le sac plastique contre sa poitrine, pousse des deux pieds la mobylette pour la faire démarrer.

 

EXT Jour, route

La mobylette s’éloigne en pétaradant et disparaît progressivement derrière le rideau de pluie.

 

CUT

 

EXT Jour, plage

Grand soleil.

Haig est assis au pied d’un rocher. En contrebas, une plage et l’océan étincelant. Derrière, la mobylette appuyée contre le rocher.

Haig est pieds nus, ses Docs posées à côté de lui. Il mange avec appétit des sardines qu’il puise dans la boîte avec des biscuits et fait passer avec des lampées d’alcool.

Une interjection en arabe le fait se retourner pour découvrir un vieil homme d’apparence pauvre, en djellaba, pieds flottant dans des babouches, appuyé sur un bâton.

Haig :
Salut.

Le vieux répond en arabe. Haig hausse les épaules.

Haig :
Je comprends rien, mon pote…

Le vieux montre la mobylette de son bâton en secouant la tête avec enthousiasme, levant un poing, pouce dressé.

Haig (se relevant) :
Elle te plaît ?

Il rassemble ses affaires tandis que le vieux continue ses mimiques approbatrices.

Haig :
Garde-la, je te la donne.

Par gestes, il fait comprendre au vieux incrédule qu’il lui laisse la mobylette.

Haig :
Pour toi… Ouais, cadeau, pépère… Pour toi…

Il descend sur la plage et se met à marcher le long de l’eau, sac plastique dans une main, paire de Docs dans l’autre.

Le vieux le regarde s’éloigner, effaré.

Plan sur l’océan qui scintille.

 

FIN

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