Salut à toutes, tous.
La littérature qu’on se délecte à lire est aussi la matière première de tous les films, téléfilms et séries que nous aimons à mater. Même s’il ne s’agit pas de l’adaptation d’un bouquin mais d’une oeuvre originale, derrière chaque thème, chaque séquence, dans certains cas chaque plan, le travail de base est celui d’un écrivain. Eh ouais, un gadjo tout seul avec ses clopes et sa boutanche devant sa ch’tite machine…
Trouvez ci-dessous un bout de scénario. A vous de deviner de quel film il est extrait…
Aujourd’hui, comme il s’agit autant d’un quizz que d’une p’tite pensée pour un valeureux camarade disparu, au lieu d’un extrait long, nous en aurons trois courts.
Premier extrait : EXT Jour, plage
Serge marche dans le sable, promenant un détecteur de métaux « poêle à frire ».
L’homme de la plage s’approche de Serge. Il a lui aussi un détecteur à la main, un bocal rempli de pièces de monnaie dans l’autre.
L’homme (narquois) :
Trop taaaard !!!… T’es arrivé à quelle heure ?
Serge :
Cinq heures.
L’homme :
J’suis là depuis quatre heures. Et bibi a tout raflé, mon pote. Eh ouais. Parce que j’ai de la jugeote… Tu veux que je te dise, quand on fait de la prospection – professionnelle, j’entends – il faut de la méthode. De la mé-thode. Depuis que tu viens, t’as pas remarqué que y’a personne qui pose sa serviette là où tu cherches ? T’irais bronzer près d’une poubelle, toi ? Non… J’vais te donner un truc, mon pote. Tu vois, de là à là, il y a une ligne imaginaire. C’est la ligne du vendeur de beignets. Le vendeur ambulant. Eh ouais. Alors les gens, tu vois, ils se déplacent et ils vont jusqu’au vendeur. Ils achètent le petit beignet et ils payent. Et quand ils payent, parfois, ils perdent des pièces. Alors, dès que j’arrive le matin, hop, je fais la ligne imaginaire…
Il secoue le bocal, faisant sonner les pièces.
L’homme :
Cinquante pièces de dix centimes, je te compte pas les « vingtes »… Parce que j’ai de la méthode. De la mé-thode.
Il dévisage un moment Serge.
L’homme :
J’t’aime pas.
Il s’éloigne en faisant sonner son détecteur et en secouant son bocal de pièces et sort du champ.
Deuxième extrait : INT Jour, cave
Dans une cave à vin sont attablés Serge et le viticulteur. Sont servis en rouge deux verres à dégustation. Serge boit une lampée du sien.
Le viticulteur :
Alors ? Qu’est-ce que t’en dis ?
Serge :
Il est bon !
Le viticulteur :
Naaaan. C’est d’la merde. J’t’ai choisi la pire cuvée, la 82. Une vraie flotte.
Serge regoûte.
Serge :
Ben, j’le trouve pas mal quand même…
Le viticulteur :
A ton avis, pourquoi on t’a pas déclaré à la caisse de retraite agricole ? Hein ? Cherche bien…
Serge :
Ben, parce que je suis pas agriculteur.
Le viticulteur :
Et pourquoi qu’t’es pas agriculteur ?
Serge :
J’ai pas le diplôme.
Le viticulteur :
Pourquoi t’a pas de diplôme ?
Serge :
J’ai pas eu le bac.
Le viticulteur :
Pourquoi t’as pas le bac ?
Serge :
Ben… Parce que… Je sais pas… Je m’faisais chier.
Le viticulteur :
Et pourquoi elle te faisait chier, l’école ?
Serge :
Ah ben ça… Oui… Parce que les profs m’emmerdaient, quoi…
Le viticulteur :
Pourquoi ils t’emmerdaient, les profs ?
Serge :
Parce que j’y comprenais rien… J’comprenais rien.
Le viticulteur :
Et pourquoi qu’t’y comprenais rien ?
Serge :
Ben… Parce que… Parce que…
Le viticulteur :
T’as qu’un mot à dire !
Serge :
Ben je sais pas, moi, je sais pas…
Le viticulteur :
J’vais t’aider. Parce que t’es con. C’est simple : je t’ai pas inscrit parce que t’es con. Complètement con.
Serge :
Ah…
Troisième extrait : EXT Jour, plage
La « poêle » du détecteur du métaux survole le sable. L’appareil sonne. La main de Serge fouille le sable et y trouve une petite gourmette d’argent.
Serge :
Aaaaah !
La caméra s’éloigne, englobe Serge, découvre l’homme de la plage qui accourt.
L’homme :
Comment t’as fait ?
Serge essaie d’accrocher la gourmette à son poignet, beaucoup trop épais.
Serge :
Ah ben, de la méthode. De la méthode… C’est le seul endroit où les gonzesses peuvent venir se faire bronzer à poils sans être vues. La petite Cécile, c’est comme si je la voyais. Elle arrive, elle pose sa petite serviette, elle s’allonge… Un quart d’heure après, elle enlève sa petite gourmette pour pas laisser de traces… Elle papote… Elle lit son magazine de gonzesses… Et elle repart. Et elle l’oublie. De la méthode !
L’homme :
T’as eu du bol, c’est tout !
Il dévisage Serge, vexé, furieux.
L’homme :
Hier, j’ai trouvé une montre. Une Jean-Pierre Cardin.
Il s’éloigne de Serge qui continue toujours d’essayer, sans succès, d’accrocher la gourmette.
L’homme (par-dessus son épaule) :
Tocard !
(A suivre)
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