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Zykë L’Aventure – Le film (25)

Publié par le 20 octobre 2018

 

Adapté du roman Zykë L’Aventure, Thierry Poncet, éditions Taurnada.

 

INT Jour, pont

GP sur l’aiguille d’une seringue qui cherche une veine sur un bras marqué de plusieurs hématomes et cicatrices de shoots.

Le plan s’élargit. C’est Msieu Poncet qui se shoote. Il est sale, pas rasé, porte sur les épaules une couverture déchirée. On découvre à côté de lui Zykë, coiffé d’un ridicule bonnet péruvien, somnolent, bouche demi ouverte, plongé dans les délices de l’après-shoot.

La caméra explore le décor : au bas d’une volée de marches qui mènent à la rue au-dessus, un parapet large d’environ trois pas, surplombant l’eau verte d’un canal. Des tags et des graffitis à la bombe recouvrent les parois. Au sol, des cartons délimitent des sortes de pièces. Matelas de mousse. Couvertures dégueulasses. Un lit pliant à la toile déformée par un trop long usage. Des cadavres de bouteilles. Des boites de bière vides. Des mégots écrasés partout. Des merdes. Une flaque de dégueulis au bord de l’eau…

Une junkie descend l’escalier, manquant se casser la gueule à chaque marche. C’est Susan : une vieille punkette blonde qui semble échappée d’un film de zombies : os saillants ; des cicatrices et des hématomes partout, corps et visage ; grands yeux bleus que la folie écarquille ; pommettes qui crèvent la peau ; lèvres incolores retroussées sur des dents verdâtres.

Susan (à Zykë, en anglais guttural s.t.) :
Hey, c’est toi l’écrivain qui paye pour des histoires de junkies ?

Zykë (émergeant) :
Oui ma belle.

Susan :
J’suis pas ta belle !

Zykë :
Okay. Je paye en dope ou en fric. Tu as des histoires ?

Susan (ricanant) :
Ferme-la, gros pédé. Des histoires ? Putain, je suis la plus putain de junkie de toute la putain de ville. Je me défonce depuis 75, man ! Donne ton putain de fric. Et ta dope. Je me fais un shoot maintenant. Maintenant !

Susan se prépare son shoot, utilisant une seringue neuve qu’elle sort de son emballage. Elle se shoote dans la carotide.

Msieu Poncet s’est approché, porteur d’un cahier d’école corné et d’un Bic. Il ouvre le cahier. Pendant ce temps, Zykë se refait un shoot.

Susan :
Qu’est-ce qu’il fait ce connard ? Qu’est-ce qu’il écrit ?

Zykë :
Tranquille. C’est mon secrétaire.

Susan :
Vous êtes des pédés. Vous voulez faire un trio ? Je vous suce ? 50 guilders chacun.

Zykë :
Non. Je veux juste entendre ton histoire.

Susan :
Mon fric.

Zykë :
Après. Comment tu t’appelles ?

Susan :
Susan.

Zykë :
Tu es hollandaise ?

Susan :
Ouais. Pas comme tous ces putains de junkies qui débarquent de partout. On devrait les foutre dehors. Ouais, je suis hollandaise, merde. Putain de junkies de merde. Donne-moi mon fric !

Zykë (patient, cool, défoncé) :
Après. De quoi tu vis, Susan ?

Susan (rigolant) :
Je ne vis pas. Tu le vois pas, que je suis morte ? Quel putain d’écrivain tu es ?

Zykë :
Tu dois bien payer ta dope. Tu es hollandaise, alors tu touches une allocation de survie, je le sais. Mais ça ne suffit pas, avec tout ce que tu t’enfiles dans les veines. Alors, tu fais quoi, tu te prostitues ?

Susan :
Ouais je fais la pute. Ça t’emmerde, hein, pédé. Vous êtes une belle paire de pédés. Vous aimez prendre des coups, hein ? Je le sais. Je me déguisais en putain de nazie pour dominer les masochistes. Putain j’ai adoré taper sur ces gros porcs. Je les mettais en sang et je les faisais payer un maximum pour ça. Waaah, le fric que je me faisais…

Msieu Poncet prend des notes. D’autorité, Susan s’est emparé du sachet de poudre et se reprépare déjà un shoot.

Zykë :
Tu continues ?

Susan :
Naaaaa. Maintenant je fais des films de cul. Je suis une putain d’actrice. Ils me payent pour baiser avec des animaux. Je baise avec des chiens. Je suce des ânes. L’autre jour, y’en a même un qui m’a fait pomper la bite d’un singe…

Elle se shoote.

 

EXT Nuit, Red District

Suite de plans courts : Zykë, Msieu Poncet, Susan et un autre junkie déambulent dans les rues du vieux quartier d’Amsterdam.

Ambiance de fête : les coffee-shops bondés de touristes qui fument en liberté ; les putains en vitrine ; les enseignes de sex-shops et de boîtes de nuit…

Zykë achète un gros paquet de dope à un dealer surinamais.

 

EXT Nuit, pont

Le petit groupe de retour sous le pont se paye une tournée de shoots. Tous s’écroulent.

 

EXT Jour, marché aux puces

Msieu Poncet devant un étal où, au milieu de merdes invendables, se trouve une machine à écrire manuelle. Msieu Poncet s’accroupit et l’essaye, tapant sur les touches du clavier. Son doigt appuie plusieurs fois sur la touche « n », sans résultat. Un plan sur le râtelier montre que la barrette manque.

 

INT Jour, papeterie

Msieu Poncet dans une papeterie, la machine sous le bras. Son allure de clochard junkie tranche sur celles du gérant et des clients, tout à fait normaux.

Msieu Poncet achète trois rouleaux encreurs et trois flacons de Tipp Ex. Ses gestes maladroits et le temps qu’il met à piger le montant de ses emplettes (44 Guilders), indisposent le gérant et lui valent des regards réprobateurs des clients.

Msieu Poncet sort de la boutique en leur adressant un doigt d’honneur.

 

EXT Jour, pont

Succession de plans courts :

Zykë se shoote en compagnie de « confidents » ;

Msieu Poncet, hagard, assiste sur un banc au débarquement de touristes d’un car (ils vont visiter la maison d’Anne Franck), lesquels lui jettent des regards de commisération ;

Msieu Poncet tape à la machine, accroupi sur un carton, à côté d’un Zykë somnolent ;

Zykë et Msieu Poncet se shootent de concert, alors qu’un vieux barbu est pris d’une diarrhée à quelques mètres ; le spectacle les fait rire.

 

EXT Nuit, pont

Zykë et Msieu Poncet se shootent en compagnie d’un jeune métis qui porte une casquette de Gavroche (Toby). On remarque que le bivouac de Zykë s’est amélioré : double matelas, couverture neuve, d’autres couvertures tendues en guise de cloisons, réchaud à gaz…

Zykë (très défoncé, en anglais s.t.) :
Okay… okay… alors… yeah… comment tu t’appelles, déjà ?

Toby :
Toby.

Zykë :
T’es pas hollandais. Attends. Tu viens d’Afrique. Afrique de l’Est, pas vrai ?

Toby :
Oui. Je suis soudanais.

Zykë :
Qu’est-ce que tu branles ici.

Toby :
Je suis marin. J’étais marin. Mon bateau a fait escale à Rotterdam. C’est là, la première fois que je me suis shooté. Putain, mec, c’était trop bon. J’ai recommencé, recommencé, recommencé. Mon bateau est parti. J’étais déserteur. J’ai continué.

Zykë :
Comment tu survis ?

Toby :
Je pique dans les magasins. Je suis bon pour ça. Des montres. Des appareils photos. Des magnétophones… Je connais des mecs qui me les rachètent. Pas super cher, mais bon, ça va. Et puis, j’ai ma femme, Karol.

Zykë :
Elle est hollandaise ?

Toby :
Non, elle est allemande. Elle est venue en vacances ici avec un copain, et puis, bon, elle est restée. Comme moi.

Zykë :
Qu’est-ce qu’elle fait ?

Toby :
Ben, euh… elle va avec des mecs, quoi.

Zykë :
Elle fait la pute ?

Toby :
Non. Elle baise pas. C’est ma femme, merde !… Elle fait des pipes, seulement…

 

EXT Jour, pont

Msieu Poncet tape à la machine. On remarque que son « bureau » s’est amélioré : empilement de cagettes en guise de table de travail, vieux coussins de divans pour siège, bougies plantées sur des culots de bouteilles…

La caméra s’approche du manuscrit. Sur la page de garde, on peut lire « Cizia Zykë – Amsterdam Zombies – Enquête ». Le « n » de « enquête » est rajouté à la main.

 

EXT Jour, dispensaire

Un groupe de junkies, dont Zykë, Msieu Poncet, Toby et sa femme blonde, Karol, font la queue devant un petit bâtiment à l’enseigne médicale. Des junkies en sortent, porteurs de pochettes de seringues neuves.

 

EXT Nuit, Red District

Dans l’ombre d’une ruelle, une fille blonde (Karol) prodigue une fellation à un touriste. L’homme jouit. Tandis qu’il se rajuste, la fille rejoint dans une rue éclairée un groupe composé de Zykë, Msieu Poncet, Susan et Toby. Karol se blottit contre Toby. Le groupe se mêle à la foule.

 

INT Nuit, bar

Le groupe dans un coffee-shop. Tous sont assis à une table, sauf Susan qui parle avec un type au comptoir. Susan s’énerve, hurle et donne des coups de poings au type, qui lui en renvoie un. Susan s’écroule par terre. Le type prend son élan pour lui balancer un coup de pied, mais la main de Zykë s’abat sur son épaule. Zykë balance un coup de poing sur le haut du crâne du gars qui s’écroule, assommé pour le compte.

 

EXT Nuit, pont

Tout le groupe se shoote autour d’une lampe à gaz.

 

EXT Nuit, pont

Msieu Poncet chantonne (knock knock knock…), penché sur des feuillets, à la lumière de la lampe à gaz.

La caméra s’approche. On peut voir qu’il rajoute au stylo les « n » manquants du texte.

 

(À suivre)

 

Zykë L’Aventure – Le film (24)
Zykë L’Aventure – Le film (26)

9 Responses to Zykë L’Aventure – Le film (25)

  1. Thierry

    Bonjour msieu poncet
    Pour moi un dès meilleur bouquin de la collection zyke/poncet.j ai lu flash- les chiens de Bangkok et d autre livres sur la drogue principalement l héroïne et il y a toujours des incohérences.
    Amsterdam zombie si vous connaissez Amsterdam etl hero vous savez que tous est tirer de vécu.Certaine chose ne s invente pas et ne peuvent pas être décrite si on ne les a pas vécu.
    J ai hâte de voir certaine scène à l écran.
    Voila merci msieu Poncet continuer on s eclate a vous lire.

  2. Nico

    En attente du dealer…

    I’m waiting for my man

    Hey, white boy, what you doin’ uptown?
    Hey, white boy, you chasin’ our women around?
    Oh pardon me sir, it’s the furthest from my mind
    I’m just lookin’ for a dear, dear friend of mine

    I’m waiting for my man

    Here he comes, he’s all dressed in black
    Beat up shoes and a big straw hat
    He’s never early, he’s always late
    First thing you learn is that you always gotta wait

    I’m waiting for my man, ah work it now…

  3. Oliv’

    De passage dans notre beau Pays je fais une grande boucle de quelques milliers et t’envoie un salut amical du centre du Mans de ce delicious resto afghan, l’aventure est au coin de la rue!.. demain je tente une incursion à la recherche d’Alma… ciao man, salut les vieux gars.

  4. Oliv’

    J’écoute France Inter pendant des heures ils parlent énormément de littérature et de culture en général, vous êtes vernis c’est pas le cas partout !! Cet aprem à 4 heure Antoine Decaune invite Frédéric Beigbeder dans son émission pop pop pop ils ont parlé pendant 1/4 d’heure de mon pote San-A et même lu un passage…! Mais vous allez encore dire que je fais mon relou…!

  5. Oliv’

    Tant pis d’ailleurs.. Beigbeder explique que c’est grâce à F.Dard qu’il s’est intéressé à la littérature lui qui ne lisait que des BD, un monde s’est ouvert à lui… je pense que le podcast se trouve facilement sur le site d’inter, bonne soirée à tous., je mange mes samossa afghan ( avec un Chardonnay bien frais c’est un délice porca puttana !! )

  6. Oliv’

    Dialogue ce matin à 9h à la grande librairie du centre du Mans :

    Client:
    – Bonjour je cherche un livre qui s’appelle Alma mais je ne sais plus si l’auteur est Cizia Zykë où Thierry Poncet…
    Vendeur (22ans guère plus)
    – ah ? Bah je ne connais ni l’un ni l’autre donc il faut que je vérifie au PC parce que le titre ne me dit rien… Zykë c’est le nom ou le prénom? (encourageant donc)

    Il tapote sur son clavier, puis, étonné: ah ! Je crois qu’on l’a ! Il s’en va au fond à droite, reviens bredouille, repart devant à droite, puis, victorieux, il me brandit Alma… Vous avez de la chance c’est le dernier!

    Il faut jamais perdre espoir, allez Thierry, coup de fil chez Taurnada, réassort en vue !

    Salut de ma chère île ( de France )

  7. Gradu Bide

    Oliv’ Malgré notre enthousiasme, Zyké reste un auteur confidentiel à part ses auto biographies
    Et encore il faut avoir au mois 40 ans pour les connaitre
    Par contre je suis sur que tu ne connais pas les paroles des chansons de Booba contrairement au vendeur

    • Oliv'

      C’est une contre-vérité je connais tout de Booba, paroles et boite à rythme, j’ai même son dernier maxi 45 tours alors…

  8. Marc Théthéou

    ouais Gradu, mais… et je dirais même plus ! dansons, chantons comme des chatons !!! donnons les livres en notre possession !!! partageons nos maigres avoirs, nos romans, nos vies nos peines, nos emmerdes, avec la jeune génération, allez ! qu’il aillent se frotter aux bas fonds ! à l’engeance du monde !