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Zykë L’Aventure – Le film (05)

Publié par le 2 juin 2018

 

Adapté du roman Zykë L’Aventure, Thierry Poncet, éditions Taurnada, en librairie ou ici :

https://www.taurnada.fr/

https://www.babelio.com/livres/Poncet-Zyk-laventure/962158

https://livre.fnac.com/a10793510/Thierry-Poncet-Zyke-l-aventure

https://www.amazon.fr/Zyk%C3%AB-Laventure-Thierry-Poncet/dp/2372580345

 

INT Nuit, bureau

GP sur une page de notes manuscrites de Msieu Poncet, à peu près illisibles, compliquées de cercles et de flèches. On entend le bruit de la machine à écrire.

Plan sur les doigts de Msieu Poncet, abîmés, porteurs d’écorchures autour des ongles. L’un des doigts se coince dans un intervalle entre deux touches.

Msieu Poncet (hors-champ) :
Aïe putain !…

Machine à écrire. GP sur un feuillet engagé dans le rouleau. Les barrettes frappent des mots qu’on peut lire :

« – Écoute, fils de pute, je me suis baisé six bonnes sœurs et une mère supérieure. J’ai forniqué, pissé et chié dans des églises, mais je »

Plan sur le visage de Msieu Poncet, pas rasé, les yeux rouges, cigarette au coin de la bouche. Il marmonne les mots en même temps qu’il les tape.

Msieu Poncet :
Mais je n’ai jamais… enculé… de prêtre… comme ta sale gueule… ne m’inspire pas… je me contenterai d’une pipe… ça m’ouvrira peut-être… les portes… du paradis.

Plan sur les notes. Bruit du clavier.

Msieu Poncet (hors-champ) :
Le charognard s’est… relevé… offusqué… Mon fils, vous délirez !… Tire-toi, salope, tu… pues !

 

INT Jour, bureau

Plan sur la fenêtre garnie de barreaux : l’aube blanchit le ciel.

Msieu Poncet écrase une cigarette dans le cendrier plein, éteint la lampe à essence, rallume une cigarette, rassemble les feuillets, se lève et, s’étant approché de la fenêtre, en relit des passages, front appuyé aux barreaux.

Msieu Poncet (marmonnant et commentant) :
Le charognard essaie de m’envoyer un signe de croix que j’évite de justesse, pas mal, ça… La religion, souffre mon frère et travaille, ce n’est pas un truc pour moi… Ce sont ces chacals en soutane que je hais, carrément… Un jour, au Sahel, j’ai pu en choper un et le tabasser, cool

 

INT Jour, réfectoire

Zykë et Msieu Poncet attablés. Un thermos de café, des galettes de pain. Zykë lit les feuillets, avec des hmm hmm approbateurs tandis que Msieu Poncet se gave de caoua tout en observant le boss du coin de l’œil.

Zykë interrompt sa lecture, pointe un passage. À l’expression de Msieu Poncet, on comprend qu’il attendait et redoutait cet instant.

Zykë :
C’est très bien. Après la scène du curé, tu as ralentis le jeu, très bien. Mais il ne faut pas redevenir trop cool. Il faut rester percutant.

Msieu Poncet approche de lui son bloc-notes et un stylo.

Zykë :
Il ne faut pas relâcher la pression. Jamais. On va retravailler ce passage tout de suite, qu’on ne revienne plus jamais dessus.

M’sieu Poncet :
Kay.

Zykë (faussement inquiet) :
T’es fatigué ?

Msieu Poncet :
Non, non…

 

INT Jour, bureau

Msieu Poncet achève de taper un passage. Il dégage la feuille du rouleau. On se rend compte que le passage compte une petite dizaine de lignes. Il découpe la feuille de façon à ne garder que les lignes. Il colle soigneusement la rustine ainsi obtenue sur le texte initial. Il consulte ses notes et engage un nouveau feuillet dans le rouleau.

 

INT jour, réfectoire

Les trois hommes achèvent de déjeuner. Sur la table couverte de miettes, au fond d’un grand tajine des restes de légumes et d’arêtes et de têtes de poisson. Zykë relit des feuillets. Driss termine de sucer une tête, s’essuie la bouche d’un revers de main.

Driss :
Patron, tu veux un joint ?

Zykë :
Volontiers, hermano. (à Msieu Poncet) On va travailler un petit peu. T’es fatigué ?

Msieu Poncet s’essuie les mains et attrape son bloc-notes.

Msieu Poncet :
Non, non…

 

INT Nuit, bureau

Suite de plans courts :

Msieu Poncet tape à la machine. La lampe à essence est allumée et siffle distinctement. Le halo de lumière est envahi d’insectes. Msieu Poncet s’écrase un moustique d’une claque sur la joue.

Plié sur la machine, Msieu Poncet étale du Tippex sur une phrase. Un insecte atterrit sur le liquide. Le repoussant du bout du doigt, Msieu Poncet étale du Tippex sur les lignes de texte voisines. Il jure.

Msieu Poncet se verse un café du thermos dans le couvercle de celui-ci, l’avale avec une grimace.

Msieu Poncet interrompt sa frappe. Il vérifie ses notes et gémit d’exaspération. Il vérifie le texte tapé et gémit de nouveau. On comprend qu’il s’est gouré quelque part. Il relit notes et texte, vérifiant qu’il est impossible de corriger.

Msieu Poncet (marmonnant) :
Merde, fait tout refaire, merde merde merde…

Soupirant mille morts, il dégage la feuille du rouleau, en place une autre et se remet à taper.

 

INT Nuit, chambre Zykë

Zykë est assis dans son fauteuil. Driss, accroupi, mélange du shit et du tabac dans le creux de sa paume. On entend distinctement le cliquetis de la machine à écrire dans la chambre voisine.

Zykë :
À la finale entre l’Italie et l’Allemagne, j’ai misé tout ce qui me restait sur les Macaronis…

Driss :
Les Italiens, ils connaissent le football, le vrai football.

Zykë :
Tu as raison, hermano. Seulement, ce soir-là, ils avaient intérêt à gagner…

Il s’interrompt, constatant que le bruit de la machine à écrire s’est inerompu. Celui-ci reprend. Rassuré, Zykë poursuit.

Zykë :
S’ils l’avaient pas emporté, je me retrouvais sans un. Comme je voulais repartir dans la jungle, j’avais besoin d’un peu de pognon pour m’acheter du matériel.

Driss :
Tu as raison, mille fois raison, un million de fois raison, les Italiens, ils le connaissent, le football…

 

INT Nuit, bureau

Suite de plans courts :

Msieu Poncet marche de long en large, s’ébrouant et se frottant les yeux, visiblement victime d’un accès de sommeil.

Msieu Poncet repose le couvercle du thermos qu’il vient de vider, allume une cigarette et se penche sur son texte pour relire les dernières phrases, marmonnant : « J’ai délimité mon territoire… et je joue… du pistolet… pour en marquer… les limites… »

Msieu Poncet a les yeux qui se ferment, la tête qui dodeline, mais il continue à frapper.

 

INT Nuit, chambre Zykë

Zykë seul, allongé sur son lit, tout habillé. Il tend l’oreille : silence.
Il se lève.

 

INT Nuit, bureau

Msieu Poncet dort, la tête au creux de son bras replié sur la machine à écrire.

Zykë entre.

Msieu Poncet sursaute, se redresse et, dans un geste réflexe, tape quelques lettres.

Zykë :
Un problème ?

Msieu Poncet :
Tout va bien !

Il jette un coup d’œil à ses notes et se remet à écrire. Sur le seuil, Zykë l’observe un moment, un sourire goguenard aux lèvres.

 

INT Jour, bureau

Plan sur la table de travail délaissée et rangée : stylos alignés, flacons de Tippex regroupés, cendrier vide.

La caméra glisse jusqu’à la couchette sur laquelle roupille d’un sommeil de brute Msieu Poncet, indifférent au soleil vif qui lui tombe dessus et aux mouches qui sarabandent sur son visage.

Des coups de poings sonores sont frappés au seuil. Msieu Poncet sursaute.

Driss (à la porte) :
Arouah, Msieu !

Il fait entrer à sa suite une femme en hijab. Elle est au moins quinquagénaire, costaude des épaules et des hanches, affligée d’un très fort strabisme.

Driss lui adresse des paroles en arabe en lui désignant la couchette.

Driss (à Msieu Poncet) :
C’est le cadeau pour toi.

Msieu Poncet (hagard) :
Hein ?

Driss :
Le patron il dit c’est le cadeau pour toi, relax détendu.

 

INT Jour, couchette

La femme s’assoit lourdement au bord de la couchette.

Msieu Poncet :
Euh… bonjour madame.

La femme :
Salam aleikum.

Elle ôte son foulard, dévoilant une chevelure poivre et sel, se dépoitraille, libérant une grosse poitrine affaissée, sort des plis de sa tunique une fiole de liniment, s’en oint les mains et adresse des paroles en arabe à Msieu Poncet, lui faisant comprendre par signes de baisser son pantalon.

Msieu Poncet :
Je… j’enlève ?…

Msieu Poncet obtempère. La femme lui prend la verge et le masturbe à gestes très doux, gentiment, tout en chantonnant ce qui semble être une berceuse.

Plans alternés sur le visage de la femme, un peu absente, un peu folle, avec son œil qui barre en couille et celui de Msieu Poncet qui grimace d’un plaisir aussi intense que rapide.

Msieu Poncet :
Arrrrgggglllll !

 

INT Jour, chambre Zykë

Zykë est allongé sur son lit, avec à proximité les désormais habituels théière et matériel à joints. Il est en train de lire le manuscrit – dont on constate au passage l’épaisseur. Msieu Poncet entre.

Zykë :
Ah, Msieu Poncet. Alors, tu t’es bien vidé les couilles ?

Msieu Poncet (encore abasourdi) :
Euh… ouais ouais… euh, merci, hein ?

Zykë :
Ne me remercie pas. C’est pour le boulot. C’est important d’avoir une bonne vie sexuelle pour la création.

Msieu Poncet rigole en coin.

Zykë :
C’est pas vrai ? Victor Hugo il ne tirait pas tout ce qui bougeait ?

Msieu Poncet :
Ouais, si, c’est vrai.

Zykë :
Tu vois.

Il brandit le manuscrit.

Zykë :
T’es fatigué ?

Msieu Poncet :
Non non.

Zykë :
Alors on va travailler un petit peu…

 

(À suivre)

 

 

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