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Zykë L’Aventure – Le film (18)

Publié par le 1 septembre 2018

 

Adapté du roman Zykë L’Aventure, Thierry Poncet, éditions Taurnada.

 

INT Nuit, Rolls

Msieu Poncet est au volant. À côté, Zykë mélange du shit et du tabac. Dehors filent les lumières d’une autoroute.

Zykë :
On va devoir mener une vraie offensive. Il faut qu’on se sente écrivains à fond. Pour ça, il nous faut cette belle baraque. Un écrivain, ça a une maison pour travailler, non ? Hugo, Flaubert, Zola, tous ces types-là, ils avaient des belles baraques, non ?

Msieu Poncet (réprimant un baillement) :
Ouais. Georges Simenon, aussi. Il avait un château en Suisse.

Zykë :
Tu vois bien !… Qu’est ce qu’il y a, tu es fatigué ?

Msieu Poncet (baillant) :
Non non.

 

EXT Nuit, route

Un panneau indique « Faro » (Portugal) à X kilomètres.

 

EXT Jour, plage

La Rolls est garée de travers parmi beaucoup de voitures. Msieu Poncet et Zykë observent avec déception une plage bondée d’estivants.

Zykë :
Bon, c’est pas le bon endroit.

Msieu Poncet :
C’est pas la bonne saison, surtout.

Zykë :
Je ne vais pas attendre que les bipèdes rentrent chez eux. Allez viens, on se casse.

Le duo regagne la Rolls.

Zykë (en decrescendo) :
En Suisse, Simenon, tu disais. C’est pas mal, la Suisse. Ils sont tranquilles, là bas…

 

INT Jour, route

La Rolls dépasse un anneau indiquant « Lugano » à X kilomètres. Zykë est au volant.

Zykë :
Il faut qu’elle soit spacieuse, tu comprends. Il faut un espace de travail et aussi des spots de réflexion. Avec des décors qui aident à la méditation. Il faut qu’on raisonne en philosophes, tu piges ?

Msieu Poncet (ensommeillé) :
Ouais, ouais…

 

EXT Jour, terrasse de café

Le duo est attablé devant le lac. Sur la table, les reliefs d’un petit déjeuner plantureux. Ayant pris l’addition, Zykë est mécontent du chiffre qu’il y lit.

Zykë :
C’est ça, le prix ? Ils se foutent de notre gueule. Putain, je ne me souvenais pas. C’est toujours pareil, avec les Suisses. Bon, c’est pas là. (Il pose de l’argent sur le ticket). Ils vont nous prendre la tête rapide, les Helvètes. Allez viens, on se casse.

 

EXT Jour / Nuit, routes

Succession de plans courts. La Rolls dépasse des panneaux indiquant des villes italiennes, « Torino », « Milano », etc… à X kilomètres. Le duo bouffe des paninis sur un bord de route. « Barri », « Tarente », etc…

 

EXT Jour, parking

Crépuscule sur la mer. La Rolls rangée sur un parking miteux, avec des vieilles bagnoles et des ordures par terre, dans les faubourgs d’une ville. Zykë, accoudé à la portière ouverte, et Msieu Poncet s’échangent une bouteille de grappa.

Une bande de jeunes voyous s’approchent, agressifs. Leur leader apostrophe Zykë de mots en dialecte qu’on comprend pas sympas. Machinalement, Zykë attrape le gars par l’épaule, lui amène la tête au bord de la portière et la lui rabat dessus. Le voyou s’écroule, assommé, oreilles sanglantes. Les autres s’éloignent prudemment. Zykë repousse l’estourbi d’un geste distrait du pied.

Zykë :
C’est pas là. Allez viens, on se casse…

 

EXT Jour, Ramblas

Petit matin. Les deux homes sont attablés à une terrasse sur les Ramblas de Barcelone. Une jeune femme passe devant eux, s’arrête, les regarde de nouveau et s’approche.

Jeune femme :
Vous êtes Cizia Zykë.

Zykë :
Oui. Vous êtes française ?

Jeune femme :
Oui. J’adore vos livres. Vraiment. Je n’arrivais plus à lire, parce que je n’aime pas les écrivains qu’on publie de nos jours. Mais alors quand je vous ai découvert… Euh… Vous me feriez un petit autographe ?

Zykë :
Volontiers. (Il s’exécute). Vous êtes en vacances à Barcelone ?

Jeune femme :
De passage, seulement. Je suis serveuse. J’ai travaillé tout l’été dans un restaurant de Menorca, aux Baléares.

Plan sur les yeux de Zykë, l’intérêt aussitôt éveillé.

Zykë (tendant l’autographe) :
C’était bien ?

Jeune femme :
Fabuleux. L’île est super tranquille. Il y fait super bon. Il n’y a pas la foule comme à Ibiza, ou tous les Allemands comme à Majorque. C’est un petit coin de paradis, vraiment…

 

EXT Jour, port de Barcelone

La Rolls est garée devant la façade de la compagnie Transmediterranea. Zykë fume à côté. Msieu Poncet sort du bâtiment, réjoui.

Msieu Poncet :
C’est bon. Y a un ferry qui part ce soir.

Zykë :
Parfait. On tient le bon bout.

 

Ext Nuit, quai

La Rolls entre dans la gueule ouverte des cales du ferry.

 

EXT Nuit, bateau

Zykë et Msieu Poncet, accoudés au bastingage, regardent s’éloigner les lumières de Barcelone.

 

EXT Jour, bateau

Zykë et Msieu Poncet voient l’île de Menorca se rapprocher : une dalle entourée de falaises blanches, magnifique, émergeant du bleu profond de la me sous un soleil lumineux.

Zykë :
On est arrivés, Msieu Poncet !

 

EXT Jour, l’île

La Rolls roule sur la route principale de l’île : garrigues, murs de vieilles pierres entourant les parcelles, fermettes blanches…

 

EXT Jour, Ciutadella

La caméra erre dans les ruelles de Ciutadella, parmi les maisons aux murs blancs rosés et les ombres sous les arcades. On visite des tout petits commerces et des petits cafés et on s’attarde sur des gens paisibles, assis devant leur huis sur des chaises de toile. Il doit se dégager de ces vues une impression de bonheur paisible.

 

EXT Jour, plaça de la Llibertat

La Rolls chemine lentement le long d’une ruelle pavée à peine assez large pour elle. Elle débouche sur une petite place carrée qu’occupe une fontaine. Il s’y trouve une petite halle aux poissons et un petit bistrot avec quelques tables dressées devant sa porte.

La caméra s’attarde sur le marché, détaillant les poissons frais pêchés et appétissants, ainsi que les matrones en train de faire leurs courses, la plupart vêtues de noir. De leur petite foule montent des commentaires en catalan où l’on distingue le mot « Rolls Royce ».

Zykë et Msieu Poncet descendent de la Rolls et gagnent la terrasse du bistrot. En chemin, Zykë désigne à Msieu Poncet la plaque de faïence émaillée qui, à l’angle de la ruelle, indique « Plaça de la Llibertat ».

Zykë (réjoui) :
Ouais, ce coup-ci, on est arrivés !

 

EXT Jour, terrasse de café.

Zykë et Msieu Poncet sont attablés devant des petits verres de gin. À une table voisine se tient Carlos : un sexagénaire très bien mis, à l’élégance anglaise, qui boit lui aussi du gin et se roule un joint de haschich très long et très bien fait.

S’en apercevant, Zykë et Msieu Poncet échangent un regard complice et satisfait.

Zykë :
Maintenant, il faut trouver une maison d’écrivain.

Msieu Poncet :
Je vais faire le tour des agences. Je cherche en bord de mer ?

Zykë :
Pas nécessairement. Je suis tellement heureux d’avoir trouvé cette île que je ne vais pas faire le difficile. Du moment qu’elle est assez grande pour y être à l’aise, qu’il y a un jardin et une belle pièce pour écrire, je serais le plus heureux des hommes.

Le voisin, Carlos, se penche vers eux.

Carlos (accent catalan) :
Excusez-moi, j’entends qu’est-ce que vous parlez et je compris que vous cherchez le maison grande ?

Zykë :
Absolument.

Carlos :
Mon tante elle possède une grande maison, no ? Que personne ne habite depuis un très grand de temps. C’est dans la campagne mais la personne peut voir la mer depuis la terrassa, no ? C’est le belle maison pour une personne de écrivain.

Zykë tape sur l’épaule de Msieu Poncet.

Zykë :
Quand je te dis qu’on est arrivés !

 

EXT Jour, chemin

La Rolls cahote lentement sur un chemin crayeux étroit et encadré de murs de pierres. Elle s’arrête devant une grande grille rouillée. En descendent Carlos et Msieu Poncet, de devant, et Zykë, de derrière.

Au-delà de la grille s’étend un parc occupé par des grands pins derrière les sommets desquels on distingue les hauts murs d’une bastide blanche.

Carlos pousse difficilement la grille, qu’entravent des herbes hautes et fait signe aux deux autres de le suivre.

Carlos :
Le propriété s’appelle Bini Pati Nou. « Bini Pati », cela signifie le fils de Pati, que j’ignore qui est-ce l’homme nommé Pati. Et « Nou » c’est « nouveau » en catalan. Bini Pati Nou.

Zykë :
C’est un très beau nom. Hein, Msieu Poncet ?

Msieu Poncet :
Heu… Magnifique ! Jamais entendu d’aussi beau nom…

 

EXT Jour, parc

Passé un épais massif de chumbos (figuiers de barbarie) le groupe chemine dans ce qui paraît être, dans la pénombre de la pinède, une décharge publique : des milliers de cadavres de bouteilles, des tapis, des bâches, des carcasses de deux-roues et de vieux appareils ménagers.

Carlos :
Les gens de Ciutadella ils ont l’acomstrumbe, no ? De jeter tous les embarras ici. Ma tante elle ne veut pas payer le gardien pour la surveillance ici, no ? Et elle ne veut pas non plus payer pour la nettoyage, alors… Ma tante, elle aime beaucoup l’argent, no ?

Zykë :
C’est bien.

Ils arrivent à la porte d’entrée que Carlos ouvre pour eux.

 

INT Jour, salle à manger

Carlos ouvre avec difficulté les grands volets d’une porte-fenêtre. Au-delà apparaît une vaste terrasse de pierre qui donne sur la campagne environnante et ses entrelacs de murs de pierres empilées. À la lumière du jour se révèle une très vaste salle d’aspect médiéval, avec une grande cheminée, extrêmement encombrée de cartons poussiéreux et de meubles cassés.

Carlos les entraîne au fond de la salle, vers un escalier de pierre.

Carlos :
En haut c’est le bureau de mon grand oncle, no ? Qu’il est mort depuis plus de vingt années.

Le petit groupe s’engage dans les marches.

 

INT Jour, bureau

Le trio dans une pièce très sombre qui paraît elle aussi encombrée de tout un bordel de vieux trucs.

Carlos bataille un moment à ouvrir des volets qui lui résistent. Zykë l’écarte et arrache brutalement les volets qu’il jette à terre.

La lumière du soleil fait apparaître un bureau avec des étagères où reposent des vieux livres et une table de travail où traîne encore du matériel d’écriture (papiers, pot à stylos, etc…)

Zykë et Msieu Poncet se sourient.

Zykë et Msieu Poncet (en chœur) :
On est arrivés !

 

(À suivre)

 

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