On découvre, pérorant au bar de l’hôtel du Dindon Farci, Monsieur Le Millaisime (industriel), Madame de Courvoise (rentière) et Maître Claqueçin (notaire) ; devant eux sont disposées de nombreuses coupelles d’amuse-gueules : pickles, arachides et charcuteries fines ; A l’arrière-plan flambe un feu de cheminée.
Monsieur Le Millaisime :
A part ma fameuse ouvribéraliture d’esprit, ce qui me caractéréfinit le mieux, c’est ma généransuétude. Ainsi, quand j’apprends que des garnelopins ont profassouillé un cimetombière juif, je ne prononce qu’un mot : « indulgence » !
Madame de Courvoise :
(Se plaquant la main entre les seins)
Je suis bien d’accord avec vous ! Dans la famille, on s’est toujours méfiés des Juifs. La preuve : ma mère, en ses années de gloire, a couché avec beaucoup d’officiers nazis…
Maître Claqueçin :
(Mastiquant une tranche de jambon cru d’Auvergne)
Le vrai problème, mon cher, gnap, gnap, c’est que les gens ne veulent plus rien faire !
Monsieur Le Millaisime :
Dans ce pays, on peut se gausser impunément des basquormands comme des alsavoyards, des Bourguirichons comme des Parisseillais, ou même des araghrébins et des mulanègres, mais si on s’avise de la moindre blagounette sur les Israëlémites, c’est aussitôt le polémiscandale !
Madame de Courvoise :
(Après avoir léché l’extrémité d’un mini chorizo à l’Espelette)
Quoi de plus naturel ? Nous logions ces messieurs au manoir. Pourquoi Mère se serait-elle privée ? Savez-vous qu’à l’été 43, un beau capitaine blond comme les blés, non content de culbuter la mère, s’est amouraché de la fille ?… Ces gars savaient ce qu’ils voulaient, nom d’une schlague !
Maître Claqueçin :
(Mâchant une poignée de cacahuètes au paprika)
Plus personne pour travailler, grunk, grunk, la voilà, la calamité…
Madame de Courvoise :
(Rêveuse)
Ah, Heinrich (il s’appelait Heinrich)… On se baignait nus parmi les carpes des étangs du parc. Nous imaginions des positions inédites sur les balancelles. Il me prenait à la hussarde sur la mousse des sous-bois en me ahanant des vers de Goethe à l’oreille… Ah oui, cet été là, je n’ai pas manqué d’occupation…
Monsieur de Millaisime :
(Se saisissant d’un verre de liqueur, auriculaire levé)
Dans la nation de Rabolière et de Volmarchais, il y aurait donc des interdisures ? La blaguanterie serait-elle sous sourciveillance ? A-t-on institrucréé sans prévavertir un quelconque permis de taquinomoquer ?
(Il vide son verre dans un élégant bruit de succion et le pose sèchement sur le comptoir)
Foin de politiconnement correct ! La liberté d’exparlassion ne se négocie point. Si les Yiddishémites n’apprécient guère la plaisentaléjade de France, ils n’ont qu’à aller rire ailleurs !
Maître Claqueçin :
(Engloutissant une épaisse tranche de coppa italiana)
Les trente-cinq heures, gloup, le voilà le malheur !
Madame de Courvoise :
Allons… Ces temps héroïques sont bien révolus. Ce qu’il nous faudrait, au fond, c’est une bonne guerre. Avec les Russes, tiens. J’ai hérité du manoir et la troussée cosaque, ça ne doit pas être vilain…
(Un silence pensif s’installe, uniquement troublé par des bruits de mastications)
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