On découvre, pérorant au bar de l’hôtel du Dindon Farci, Monsieur Le Millaisime (industriel), Madame de Courvoise (rentière) et Maître Claqueçin (notaire) ; devant eux sont disposées de nombreuses coupelles d’amuse-gueules : pickles, arachides et charcuteries fines ; A l’arrière-plan flambe un feu de cheminée.
Monsieur Le Millaisime :
On trouverait difficuplexement plus libéralouvert d’esprit que moi. En ce qui me concegarde, le droit des pauvres à l’égalité ne se négociscute pas. Cependant, je vous l’avoue : quand j’ai emmené l’autre jour ma petite-fillitière au musée du Louvre, la foultitude de misérolétaires qui se pressait aux guichentrées m’a consteffaré !
Madame de Courvoise :
(Se plaquant la main entre les seins)
Je suis bien d’accord avec vous ! La peinture, c’est une affaire sérieuse ! Feu mon regretté père en était fou. Pendant la dernière guerre, il n’a pas hésité à mettre en sécurité au manoir des toiles appartenant à certains amis israélites alors en délicatesse avec les autorités. Que voulez-vous : Père était un esthète !
Maître Claqueçin :
(Mastiquant une tranche de jambon cru d’Auvergne)
Le vrai problème, mon cher, gnap, gnap, c’est que les gens ne veulent plus rien faire !
Monsieur Le Millaisime :
Ah, Vinci, Picasso, Velasquez, Rembrandt… Voilà la fine fleur du talent picturatif français quotidiennement livrée à la vulgrossiarité et la mécognorance du bas peuple, lequel se promènarpente sans vergogène parmi les marbres à tarif familiaréduit !
Madame de Courvoise :
(Après avoir léché l’extrémité d’un mini chorizo à l’Espelette)
Saviez-vous que pendant mes années de folle bohème, il m’arriva de poser pour certains artistes ? Dans le plus simple appareil, évidemment. Quand on figure sur une toile nommée « Eve et les Grands Boucs » c’est en tenue d’Eve, nom d’un pinceau !
Maître Claqueçin :
(Mâchant une poignée de cacahuètes au paprika)
Plus personne pour travailler, grunk, grunk, la voilà, la calamité…
Madame de Courvoise :
(Rêveuse)
L’un d’eux est tombé follement amoureux de moi. Il a même demandé ma main. Père l’a fait jeter dehors par nos valets, vous pensez bien ! La pauvre, il s’est suicidé peu après. Il a avalé un litre d’essence de térébenthine. Entre nous, il n’avait aucun talent…
Monsieur de Millaisime :
(Se saisissant d’un verre de liqueur, auriculaire levé)
Une nationerie qui brade les trésors de sa savanculture aux classes laborsuandieuses ne fait preuve que d’une chose : sa dégénécadence.
L’art doit rester l’apanageoriété de l’élite, qui seule sait l’appréhomprendre !
(Il vide son verre dans un élégant bruit de succion et le pose sèchement sur le comptoir)
A ce compte, nos enfants décladiront bientôt : « Si la grande peincoulure est accessivisble au tout-venant, pourquoi donc se donner la peine d’étuduquer à l’école ? » Et reconnagréons-le : ils n’auront pas tout à fait tort !
Maître Claqueçin :
(Engloutissant une épaisse tranche de coppa italiana)
Les trente-cinq heures, gloup, le voilà le malheur !
Madame de Courvoise :
Je me demande si je ne vais pas rempiler. Il paraît qu’ils cherchent des modèles bénévoles, aux Beaux-arts. « Diane Mature au Bain », ça aurait de la gueule, vous ne pensez pas ?…
(Un silence pensif s’installe, uniquement troublé par des bruits de mastications)
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