Message de l’auteur : Un jour, mon cousin me dit : lis « ORO ». J’ai décollé avec Zykë, pour atterrir sur Thierry (Poncet). Avec mon poil de culot, j’ai plus ou moins postiché ses Cons-versations. Super fier du soutien de Thierry, j’ai persévéré… eh bien, eh bien… quelle aventure !!! Écrire c’est créer. Mais attention au retour de fourche car un jour, je m’ai clamsé, et…
La porte est bizarre, mal foutue. Écaillée, à moitié pourrie, elle ne donne pas envie d’entrer. Mais bon, je ne vois pas autre chose à faire que d’y aller. Du bout du pied, je l’ouvre et en franchis le seuil.
Moi :
Voyons voir…
Un coup de gourdin m’accueille. Il m’envoie trois mètres plus loin, tchak !
Voix :
COMME QU’ON S’RETROUVE, MÔSSIEUR OLIVIER !
Moi (me relevant, groggy, marmonnant) :
Gne gnonnais cette voix. Gnen suis sûr, gne l’ai entendue gn’y a pas si longtemps.
Devant moi un genou. Au-dessus, une cuisse poilue. Plus haut, un cache sexe en poils de yack. Après, il faut que je recule pour distinguer le haut.
Moi (stupéfait) :
Mince, mais t’es super grand, Satan ! Au moins quatre mètres !
Car c’est bien le prince des enfers se tient devant moi, les sabots luisants, les jambes écartées, les mains sur les hanches, fier comme un bouc, avec un sourire… ben… satanique sur les lèvres.
Satan :
ÉCRASE, MISÉRABLE ! T’ES AUX ENFERS. T’ES À MOI. FINIE, LA RIGOLADE. VIVANT T’ÉTAIS INTOUCHABLE. MORT, T’ES MA CHOSE…
Moi (pas impressionné, non mais, oh, dis!) :
Que tu crois ! Premièrement, tu vas me parler normal, que les textes en capitales sont galères à écrire. Deuxièmement, tu vas mesurer un mètre soixante, parce que j’ai la nuque qui grince.
Satan :
QUOI ? TU OOOOoooozzzzes me répondre ?
Sa grosse petite voix descend vers moi. Sa tête cornue itou.
Moi (baissant les yeux) :
Ben voilà. C’est mieux. Et maintenant reprenons :« Bonjour Olivier, comment va ? Bienvenue en enfer, etc, etc… ». Allez, à toi !
La patate qu’il m’assène me pète le nez et deux dents. Une troisième, une prémolaire, hésite mais abandonne quand je mets le doigt dessus. Je ne l’ai pas vu venir celle-là. J’attends trois semaines, le temps qu’elles repoussent.
Moi :
Pas mal pour un vieux. Un poil susceptible, mais rapide comme la foudre. Et surtout qui…
Et surtout qui me souffle dessus, façon dragon, et me carbonise la tête. C’est embêtant. Mes précieux cheveux longs avec, ce qui est grave.
Moi (tentant un geste apaisant) :
Okay, tu n’es pas vieux… Susceptible ?
Superbe coup de pied sauté retourné qui m’explose la mâchoire et les cervicales. Ma tête part faire un tour du monde pour s’arrêter de guingois sur mon épaule gauche…
Moi (me prenant la tête à deux mains et la réinstallant correctement, produisant un joli son de castagnettes) :
D’accord. Okay. D’accord. Pas beaucoup d’humour aujourd’hui, okay. Dacodac. Est-ce que je peux te poser une question sans que tu m’arraches la tête ?
Satan (allumant un lance flammes qu’il braque sur mes précieuses) :
Ça dépend d’la question.
Moi (plaçant par réflexe mes mains en conque sous ma ceinture) :
Comment se fait-il que je me retrouve en enfer ? Je ne me souviens pas avoir fait de trucs suffisamment horribles pour mériter ce châtiment. Ou alors j’ai loupé quelque chose ?
Satan (reposant son arme au râtelier) :
Trop facile, mon pote. Les pingouins d’l’accueil n’s’appellent pas Elliot Ness, si tu vois qu’est-ce que j’veux dire. Je leur ai promis ce qui fait de toi un homme en échange d’une erreur d’aiguillage à ton arrivée.
Moi :
Les anges ? Ils n’ont pas de sexe. Si tu leur en greffes, ils seront bannis, tout le monde sait ça.
Satan (souriant) :
Gagné ! J’leur ai vidé tout l’service d’un coup. Les voilà en plein recrutement. Dieu tire une gueule pas possible. Tout ça grâce à toi.
Moi :
Surtout ne me dis pas merci.
Satan :
Non.
Moi (tâchant d’être convaincant) :
Ça se savoir. Quand ils vérifieront, tu vas en prendre pour ton grade, mon Satanas. Sa / sa / sa / sa / ta / ta / ta / ta / n / n / n / n /a / a / a / a / a / s / s / s / s / s / ssssss…
Le katana est déjà de retour dans son fourreau quand les dix-huit morceaux de mon corps s’écroulent à ses pieds.
Ma moitié inférieure de visage :
T’es con, merde !
Je n’ai jamais assuré ni au puzzle, ni au casse-têtes. Là je suis confronté aux deux. Tant bien que mal, au bout d’une trentaine d’années, je me retrouve à nouveau entier. Satan est toujours devant moi, se léchant les babines d’une longue langue… euh… satanique.
Moi :
Je vois : quelques décennies n’ont pas émoussé ton envie de me torturer.
Satan :
Non.
Moi (levant les bras en signe de reddition) :
Temps mort ! On peut discuter ?
Satan :
Bof.
Moi :
Pour plus de précautions, tu vas lâcher tes armes, rentrer tes griffes et m’écouter. D’accord ?
Satan :
Mmmf…
Moi :
Tu n’as pas l’air de comprendre que j’écris en ce moment même cette histoire.
Satan :
Conneries, mec. Continue et j’t’arrache la peau. Ah : et pis j’te bouffe le foie.
Je fait apparaître deux fauteuils, lui en désigne un et m’installe en face dans son jumeau.
Moi :
Mon Satinou…
Satan :
…
Moi (le défiant du regard) :
Tu vois : tu ne dis rien.
Satan :
…
Moi :
C’est parce que je ne t’ai pas écrit de réplique, mon Satinou. Donc, on va conclure un deal. Tu as bien magouillé et je suis pour un bout de temps obligé de rester ici. Okay. D’accord. Okay. Mais, tu vas arrêter de m’étriper à tout bout de champ, parce que ça pique.
Il m’enfonce jusqu’à la garde un coutelas dans le ventre.
Satan (souriant… euh… sataniquement) :
Et là, ça pique ?
Moi :
AÏEUUUUX !!!
Merde, en tant qu’auteur, il faut que je fasse attention. Mon personnage commence à prendre le dessus. Et ça, c’est pas bon. Pas bon du tout…
Moi (hurlant avec la dernière énergie) :
COUCHÉ SATAN ! PAS BOUGER ! (Je retire la lame et la lui balance dans la gueule) MERDE ! Écoute-moi, Ange Des Ténèbres De Mes Deux. Tu commences à me courir sur le haricot, et je suis poli. Écoute le deal que je te propose.
Satan :
J’écoute.
Moi :
Un jour, IL va découvrir ta magouille.
Satan :
IL ?
Moi :
LUI.
Satan (inquiet) :
LUI ?
Moi :
LUI. Et ce jour-là, tu vas en prendre pour ton grade. Moi, j’suis pas revanchard. Si tu ne me fais pas trop chier, je plaiderai ta cause. Alors on l’a ce deal ?
Satan (secouant la tronche) :
Dieu ne fera rien contre moi. Je suis responsable des enfers, et ça l’arrange. Ton petit passage chez nous, tu l’oublieras dès ton arrivée au paradis. Mais bon, j’aime l’adversité. De plus tu as le culot de continuer de me chercher avec tes Cons-versations qui, tout compte fait, me font marrer. Donc : okay.
Moi (ravi) :
Okay ?
Satan :
Okay. Mais je suis diaaaaaablement lunatique. Tu me pardonneras, j’espère, mes sautes d’humeurs…
Il sort un 357 magnum et me tire dans la tête.
Bang.
(Fin)
(provisoire, on espère)
C’est sur cette satanerie que l’Ami Olivier conclut une saison d’hiver qui, nous l’espérons, potesses et poteaux, vous aura distrait quelques minutes, bien précieuses en ce triste monde. Un million de mercis, Olivier. On t’attend pour une nouvelle volée de cons-versations à ta façon, disons… hmmmm…. aux beaux jours ?